il ne sait pas lui dire non, c'est comme agnès, il suffit qu'elle fasse un joli sourire et les yeux doux. il suffit qu'elle demande. il se démène avec son nœud papillon, et déjà il regrette d'avoir accepté. caldwell, à un gala. caldwell en costume, sans clope ni drogue. il ne tiendra pas, mais c'est trop tard pour annuler. à vrai dire, il pourrait, c'est même totalement son genre, mais liv l'attend, elle compte sur lui. elle est l'une des rares, très rares, rarissimes, personnes à qui il ne fera jamais faux bond. c'est ainsi, il ne se l'explique pas.
après avoir nourri le piaf sans nom, keen sort de chez lui en faisant tourner les clés de la voiture autour de son doigt. il dévale les marches d'escalier, au retard comme à son habitude. sans doute grille-t-il un ou deux feux (il ne saurait dire, trop occupé à tirer sur son noeud papillon que pour respecter le code de la route).
son costume l’oppresse, le nœud plus encore. keenan frappe à la porte en se retenant il ne sait comment d'arracher tout cela. il n'a jamais aimé s'habiller chic, et il n'aimera jamais. il ne se sent pas bien dans sa peau, cela le met au contraire très mal à l'aise. lorsqu'il est question de l'ennuyer avec sa nouvelle passion, le mari de liv est présent, mais quand il faut se coltiner une soirée mondaine... keenan soupire.
« tu m'es éternellement redevable », lâche-t-il alors qu'elle ouvre la porte, ne lui laissant pas le temps de le saluer ni quoi que ce soit. heureusement qu'il a parlé avant de la voir, autrement il n'aurait pu prononcer le moindre mot. elle est magnifique, c'est tout ce qui lui vient à l'esprit et il est incapable de l'exprimer. il a la bonne idée de serrer les mâchoires pour ne pas ouvrir la bouche en grand -autant ne pas être totalement ridicule.
liv est toujours très belle, c'est un fait établi que caldwell n'a jamais nié. mais, jusque là, ça ne le perturbait pas vraiment. il s'agit là d'un autre niveau, et il regrette un peu moins d'être son cavalier ce soir. tant qu'il n'a pas à discuter avec des snobs. « jolie... la robe. » il se reprend maladroitement et ose un vague sourire. débile.

keen a un peu de mal à s'imaginer dans une soirée mondaine, la jolie nightingale à son bras. il n'est pas de ce monde, pas de son monde. et puis surtout cela lui semble un peu déplacé vis-à-vis de finn nightingale (envers qui il a une aversion naturelle et inexplicable). il n'a pas envie d'être l'ami choisi à la dernière minute parce qu'il fallait bien quelqu'un pour l'accompagner. trop tard. il s'imagine déjà, malgré ses talents d'adaptation et sa décision de rester à sa place pour ne pas ridiculiser et gêner liv, totalement paumé. il a le sentiment que, malgré l'effort vestimentaire qu'il fait en ce jour, il serra tout de suite pointé du doigt. quelque chose en lui le trahira, il n'est pas comme tout ces gens et cela se ressent. il ne veut pas être le boulet à la cheville de liv.
arrivé devant la porte, il n'est plus question de faire marche arrière. il s'est engagé, too late. quel idiot. il frappe à la porte, presque désespéré par sa propre bêtise. il était obligé d'accepter, bien sûr. croyait-il vraiment pouvoir débarquer comme une fleur dans un monde diamétralement opposé au sien ? et puis c'est la faute de liv, elle qui souriait et lui faisait les yeux doux en demandant un service qui, sur le moment, ne semblait pas aussi insurmontable qu'il le lui apparaît maintenant.
« je te promets que je te revaudrai ça, agent bond. » il sourit et pénètre dans la demeure -un peu trop grande à son goût- de la jeune femme. il n'est jamais venu, et ne reviendra surement jamais. disons qu'il préfère son petit nid, son appart bordélique mais chaleureux. ici, il se sent... étranger. il fait tâche, même avec tout ses efforts. « je prépare ma vengeance. » c'est faux, de toutes manières il n'y a rien qu'il puisse lui faire faire qui la mette aussi mal à l'aise que lui l'est à l'instant, en costume et nœud papillon. et puis, l'embarrasser, il n'en a pas envie. « et ce n'est un compliment que si je suis pierce brosnan », ajoute-t-il. de tout les acteurs qui ont incarné james bond, brosnan est celui qu'il préfère.
il évoque sa robe, de façon à la complimenter sans trop se griller. il n'aime pas faire des compliments, il n'aime pas s'entendre remercié. et puis c'est compliqué, comme tout chez lui. « comme tu vois, ce soir je suis gentil », se contente-t-il donc de dire lorsqu'elle fait remarquer qu'il s'agit là d'un compliment. effectivement, ce soir il est plutôt aimable, il suffit de considérer le fait qu'il est là, habillé en pingouin et prêt à passer des heures à un gala bourré de gens coincés à l'esprit étriqué. « je savais qu'au fond de toi se trouvait un homme coquet. il y a juste un petit truc à arranger... » elle approche, ou plutôt le rapproche d'elle, et arrange le nœud papillon sur lequel il a passé le trajet à tiré pour cesser d'étouffer. de toutes manières, elle fait cela mieux que lui. et ce n'est pas exactement sur le nœud qu'il est concentré, mais bien sur elle. elle si proche, elle qui ne semble même pas avoir conscience que cette proximité est perturbante. sans doute car elle a un mari qu'elle aime tandis que keenan... est keenan. alors il rebondit sur une affirmation à laquelle il n'avait pourtant pas l'intention de répondre: « coquet, moi ? n'importe quoi. » il quitte son regard et cherche un quelconque sujet d'intérêt dans la pièce.
« là, tu es par-fait. » il hausse les épaules. le fait qu'elle embrasse sa joue n'aide pas. « je le suis toujours, c'est juste que tu ne le remarques pas. » qu'est-ce qu'il nous fait ? tout cela ressemble à s'y méprendre à une petite crise, bien qu'il conserve un ton parfaitement normal, blagueur. il ajoute un petit merci pour la peine qu'elle s'est donnée à le rendre présentable et est bientôt soulagé de son malaise par le son d'un klaxon devant la maison.
« bon, le chauffeur est en bas... il faut y aller. » keenan pourrait jurer qu'elle n'en a pas envie. encore moins que lui, si ça se trouve. la force avec laquelle elle serre son bras en témoigne. elle a peur. « mmh, je vois ça », fait-il, vaguement moqueur, constatant qu'elle ne bouge pas et n'a pas l'air décidée à le faire. « je ne te porterai pas, ça froisserait mon costume. » il détend l’atmosphère avec ses bêtises, il faut bien. pour sa part, il n'est pas stressé, seulement oppressé. il n'a pas envie d'y aller, et il sait d'ors et déjà qu'il n'aimera pas la soirée en elle-même, mais un caldwell trouve toujours le moyen de se distraire et de s'amuser. tout comme il sera capable de mettre liv à l'aise, même face à une bande d'inconnus inintéressants.
« hey, ils ne te mangeront pas. je les en empêcherai », fait-il, lui adressant un clin d'oeil. il serre brièvement sa main dans la sienne et ouvre la porte. il la franchit afin que liv lui emboîte le pas. il prendrait bien l'initiative de parler à sa place une fois à cette soirée, mais il risque fort de faire des dégâts. il n'est pas fait pour cette vie là, pas du tout. sa vie lui convient très bien, l'argent qui coule à flots ne l'attirant pas le moins du monde. une fois devant la voiture, il ouvre la portière pour liv.

« je doute que tu puisses faire pire qu'une soirée mondaine. » elle n'a pas vraiment tort, ce genre de soirée paraissant des plus ennuyeuses. en particulier à keenan, monsieur canapé-télé. mais, pour lui, c'est une... expérience. en espérant que ce ne sera pas une erreur. quant à liv, il est plutôt content de constater qu'elle n'est pas fana des galas auxquels son statut lui impose de prendre part. il ne sait pas trop pourquoi, mais savoir que son monde de riches ne lui plait pas le réjouit. sans doute car il n'a rien de beau, de grand ou de cher à lui proposer, et que devoir se passer d'elle car elle se lasserait de ce qu'il est lui est impossible. c'est trop tard, il l'apprécie trop que pour accepter maintenant de la perdre. alors ça le fait sourire, keenan.
il ne sait pas trop comment, mais ils en viennent à parler de pierce brosnan, et de sophie marceau. cette conversation n'a pas beaucoup de sens, c'est ce qui plait au musicien. il n'a pas l'habitude d'être celui qui écoute et prend part aux délires d'une tierce personne, étant d'ordinaire le premier à dire n'importe quoi et à passer du coq à l'âne. liv le prend souvent au dépourvu, que ce soit dans sa façon d'être ou de parler. elle est imprévisible, un peu comme lui. mais en mieux, évidemment. il ne lui arrive pas à la cheville en tant que personne. « tu seras ma liv nightingale, c'est déjà très bien. » il le pense sincèrement -il ne dit jamais rien qu'il ne pense pas, à moins que ce soit sarcastique. d'ailleurs, cela le met mal à l'aise. elle a tendance à lui faire cet effet.
sur le pas de la porte, liv hésite. ni elle ni lui n'ont envie de se rendre à cette soirée, mais il faut ce qu'il faut. il est là pour ça, et il a enfilé un costume. UN COSTUME. pire encore, un nœud papillon qui l'oppresse et le fait se sentir comme un pingouin. pas le pingouin classe de batman, mais le pingouin maladroit dont on se moque lorsqu'il se dandine sur la glace.

le chauffeur des nightingale ne revient pas à keen. sans doute à cause du regard insistant qu'il lui lance, comme s'il n'avait pas sa place dans cette voiture. comme si avoir liv au bras (cramponnée à son bras, si vous voulez tout savoir) n'était pas digne de lui. ça, il le sait déjà. mais cela le vexe. « bonsoir charles », qu'il sourit avec une certaine hypocrisie. cet homme est un valet et se sent supérieur à lui, sérieusement ? « enchanté, monsieur. » il lui ferait bien avaler son volant à celui-là, mais il ne dit rien.
arrivés à destination, keenan s'empresse d'aller ouvrir la porte à la jeune femme, qui s'accroche à nouveau à son bras. il sourit, amusé par son état de stress. lui n'est toujours pas anxieux -il ne l'est jamais- mais elle le rend quelque peu nerveux avec toutes ses craintes et mises en garde. il remet machinalement son nœud papillon en place, comme s'il savait ce qu'il fait alors que pas du tout. « je suis obligé de te retenir ? parce que ça me plairait de voir ça... » il s'amuserait beaucoup de la voir courir après la voiture sous les regards remplis d'incompréhension des personnes présentes. deux couples font signe à liv, et ils se dirigent donc vers eux. assommé par les informations, keen ne retient rien de plus que le fait qu'il faut sourire et que ces gens sont loin d'être son type de fréquentations. il lève imperceptiblement les yeux au ciel. « t'es pas obligée de me dire qui sont les gens, leur nom me suffit, parce que si je dois être agréable mieux vaut que je n'en sache pas trop. »
il a à peine le temps de lâcher un « bonsoir » que les questions se mettent à fuser. il se force à sourire, les mâchoires légèrement serrées. il doit mentir, il n'en a pas envie. « keenan caldwell » lâche-t-il en serrant des mains sans répondre aux premières questions, qu'il a déjà oubliées. au moins, si l'attention est focalisée sur lui, liv sera tranquille un petit moment. « oui, erskine caldwell est un ancêtre. » erskquoi ? il ne connait même pas ce nom mais si on lui pose la question c'est qu'il était intéressant comme gars, alors oui est la meilleure réponse. « je suis musicien, liv et moi nous sommes rencontrés il y a quelques années de cela à un gala de charité organisé par ma soeur. » n'importe quoi, quelle soeur ? il se sent à présent comme un pingouin dans un zoo, fixé par tout un tas de visiteurs intrigués. alors il change habilement de sujet: « parlez-moi donc de vous, liv n'a pas eu le temps de m'en dire beaucoup. buchanan et winston, c'est cela ? » fait-il, se trompant exprès de personne en les désignant. ils se mettent donc à lui déballer leurs vies, insistant sur le fait qu'il les connait forcément, et il ponctue leurs discours d’acquiescement et autres sourires forcés. il glisse un coup d'oeil à liv et lui adresse un petit sourire victorieux.

« ce que les autres en pensent, je t'assure que je m'en tamponne » fait-il remarquer alors qu'elle ne s'étonne pas le moins du monde du fait que la voir courir après la voiture l'amuserait. il sait très bien qu'elle aussi, à sa place, s'amuserait d'une telle situation. mais ils ne sont, ni elle ni lui, comme ceux qui les entourent ce soir. ils ont plus d'humour, moins d'estime d'eux-mêmes. ils valent dix fois mieux, selon keenan. il n'est pourtant pas du genre à se croire supérieur, mais il sait qu'il a une certaine valeur et que la plupart des personnes présentes ne pensent qu'à leur petite personne. parfois à leurs familles.
ils s’avancent vers deux couples dont la simple vision irrite le musicien. sans compter ce que liv lui annonce à leur sujet, de quoi plomber l'ambiance. il lâche un aïe pour la forme lorsqu'elle lui met un discret coup de coude et sourit à leurs interlocuteurs. ses interlocuteurs, puisqu'il est le seul à capter leur attention. après des salutations expédiées, il se fait assommer de questions plus inutiles les unes que les autres. c'est une sorte de jeu de rôle pour lui, qui invente des mensonges plus gros à chaque fois qu'il ouvre la bouche. liv le sauve d'une interminable histoire de golf lorsqu'elle annonce qu'ils doivent s’éclipser pour voir le reste des invités. keen prie pour ne pas avoir à converser aussi longtemps avec les prochains.
« passez une bonne soirée. » il leur aurait bien souhaité de s'étouffer en mangeant des crevettes mais ç'aurait été mal vu. emboîtant le pas à liv, il hausse humblement les épaules pour mieux se la jouer riche égocentrique un centième de seconde plus tard: « vois-tu, je suis un comédien et orateur hors pair. sans parler de mes talents d'embrouilleur. » il imite parfaitement les deux snobinards avec lesquels les minutes se sont transformées en d'interminables heures d'écoute passive de leurs inintéressants exploits. il les méprise assez, c'est toujours comme ça avec les pleins aux as. sauf liv, son unique exception.

ils se saisissent de coupes de champagne et traversent la foule en saluant çà et là quelques nouveaux inconnus. keenan n'est pas des plus intéressé par ces gens, mais il fait l'effort de le faire croire. la remarque de liv l'arrache à ses pensées, et il se retient de rire. « tu veux vraiment que j'annonce à tout tes copains que je suis musicien dans la rue et que mon appart entre dix fois dans cette pièce ? » il sourit, lui dont la situation ne lui fait aucunement honte. il est même fier de se satisfaire de ce qu'il a. il n'a jamais eu besoin de plus qu'un toit, de quoi manger et sa passion pour la musique. il a de toutes manières si longtemps vécu dans la précarité qu'un rien lui suffit.
« olivia ! votre mari et vous êtes absolument charmants ! j'espère que vous passez une bonne soirée. » il a bien envie de rire. son mari ? on aura tout entendu. cela signifie au moins une chose: il se fond dans la masse. ça le vexe presque, il n'a tellement rien avoir avec tout ces gens de la haute. et il remarque que liv en est gênée; elle lâche sa main. il peut comprendre, elle n'a pas trop intérêt à ce que l'on rapporte à finn qu'elle s'est baladée main dans la main avec un autre homme au beau milieu d'une soirée mondaine. il est seulement là pour lui tenir compagnie. keenan est une dame de compagnie, en gros. très honorifique. « j'ai envie de dire qu'on a beau ne pas être un couple, on est effectivement charmants. les plus charmants du lot. » son regard survole les lieux, mais il ne trouve personne arrivant à la cheville de liv.
« viens, on va goûter les petits fours... histoire d'avoir quelque chose à complimenter dans le livre d'or. » il sourit à nouveau. elle est beaucoup plus détendue qu'au début, sans doute l'assurance feinte dont il fait preuve aide-t-elle à la détendre. ainsi que le champagne, bien qu'elle n'en ait pas tant ingurgité que cela. en tout cas, il est bien content de la voir sereine, et même enjouée. la soirée en sera moins pénible. « tu m'as eu à l'évocation de nourriture. » ils traversent la foule jusqu'au buffet. là, elle lui désigne une certaine eleanor hooper apparemment couguar et fan de musiciens. il rit doucement devant l'excitation digne d'une enfant dont fait preuve la jeune femme.
« elle adore les musiciens ? je m'en vais de ce pas chasser le couguar, si tu vois ce que je veux dire. » sur ce, il laisse liv seule auprès du buffet le temps d'approcher eleanor hooper. il lui suffit de passer derrière elle en sifflotant pour attirer son attention, et c'est elle qui l'aborde. il ne faut pas croire, keenan sait très bien y faire. « vous vous ennuyez ? » plus tant que ça, maintenant qu'il a trouvé une distraction des plus amusante. cependant, il lui sourit et hausse les épaules. « ce genre de soirée, ce n'est pas ma tasse de thé. personne ici n'accorde le moindre intérêt à la seule chose qui, personnellement, me passionne. » il l'intéresse, il le lit dans son regard et ne peut réprimer un sourire. son regard se pose brièvement sur liv avant de revenir à son interlocutrice. « la musique, madame, la musique. » nul besoin d'attendre sa réponse pour savoir qu'elle est totalement intéressée.
« j'ai son numéro, l'adresse de son hôtel, et un peu plus j'aurai gagné une marque de rouge à lèvres. j'ai préféré m'éclipser avant », fait-il en tendant un bout de papier à liv. il rit doucement et jette un œil derrière lui au cas où sa nouvelle admiratrice le chercherait. « je crois qu'on va passer le reste de la soirée à l'éviter, parce que je l'aime bien mais mes charmes ont trop bien opéré. » il attrape un petit four et prend sans trop y réfléchir la main de liv dans la sienne, l'attirant derrière lui afin de trouver un coin le plus éloigné d'eleanor que possible.

« tout le monde ne peut être aussi instruit et parfait que moi, je vous pardonne très chère. » il force un peu le trait, mais c'est presque ce qui ressort des conversations qu'il vient d'avoir avec deux des personnes les plus égocentriques du monde. exactement le genre qu'il ne supporte pas, mais il fait un effort pour ne pas s'emballer. il joue un rôle, ça lui simplifie les choses. il est au milieu de personnes dans le même cas que lui, porteuses de masques. tous le même, celui du mensonge. keenan est un bon menteur, c'est devenu une habitude, mais s'il y a bien un défaut qu'il n'a pas, c'est l'hypocrisie et l'égocentrisme. keen est quelqu'un d'extrêmement simple, il n'a jamais connu que cela et ça lui convient très bien. les sourires faux qui l'entourent et les compliments dégoulinants d'hypocrisie qu'il entend çà et là le rendent malade. cependant, il est là pour soutenir liv, il ignore donc les nombreuses choses susceptibles que le rendre désagréable, voire hostile. il sourit comme elle lui a à nombreuses reprises rappelé de le faire, il porte son masque comme tout les autres. mais, tant qu'à faire, autant s'amuser un peu. il cherche donc une source d'occupation pas trop désagréable pour passer le temps. discuter avec liv en est une bonne, bien que cela commencer à mal tourner dès qu'il prononce le mot copains pour désigner les gens présents. elle se vexe, il ne relève pas, mais il ne fera plus l'erreur.
« je n'ai de toutes manières pas l'intention de discuter avec beaucoup d'autres... personnes. » c'est sa façon de couper court à cette discussion. oh, il est ravi qu'« être amie avec un musicien la comble » mais, comme à chaque fois qu'on le complimente, il est obligé d'être vaguement sur la défensive. il n'aime pas ça, cela le met mal à l'aise. et le malaise, c'est le pire sentiment qui soit pour caldwell. il déteste que les choses lui échappent, lui qui contrôle toujours si bien
afin de faire passer l'erreur d'une dame l'ayant pris pour finn, la jeune femme entraîne keenan vers le buffet. il est loin d'être mal à l'aise, après tout cela ne lui fait rien du tout. mais liv, qui lui tenait la main, a de quoi être embarrassée. et il ne trouve rien à lui dire. alors il passe à autre chose, ce sera aussi bien. « navré, manger m'importe plus que n'importe quoi. » n'importe quoi ? peut-être. mais n'importe qui, pas sûr. cependant, il se voit mal lui dire qu'elle est plus importante que tout le reste. il l'aime beaucoup, peut-être s'est-il même un peu trop attaché à elle, et parler de ce qu'il ressent serait le summum du malaise. c'est pire que tout. seule agnès sait exactement ce qu'il pense d'elle, les autres doivent se contenter de suppositions et de sentiments lâchés accidentellement.

« keane, qu'est-ce que tu... » il lui adresse un clin d'oeil. « je pars en quête d'une distraction », fait-il le plus naturellement du monde. il n'est pas bien, keenan, pas très juste dans sa tête. la moindre occasion de s'amuser, il la saisit sans se poser de question. du moment que cela ne risque pas d'embarrasser liv, il peut se permettre de faire un peu l'idiot. après tout, c'est sa spécialité. il aborde donc subtilement la fameuse eleanor et obtient son numéro plus rapidement qu'il ne l'aurait cru. ça le fait rire, bien qu'un peu flipper quand même. les couguars, c'est pas trop son truc, encore moins quand elles ont l'âge d'être sa mère. encore moins quand il est avec liv. d'ailleurs, de retour auprès d'elle, il remarque sa nervosité et sourit lorsqu'elle lui donne une tape sur le bras en lui intimant de ne jamais recommencer ce genre de chose. « quoi, je t'ai tant manqué ? » il rit doucement et la laisse s'agripper à son bras comme pour le retenir près d'elle. disons que c'est loin d'être dérangeant que de savoir qu'elle ne veut plus qu'il la quitte, ne serait-ce que par peur d'affronter la foule seule. il rit d'autant plus lorsqu'elle s'offusque de savoir qu'il a également l'adresse de l’hôtel d'eleanor hooper. « si quelqu'un doit te faire une marque de rouge à lèvres ce soir, c'est moi. la place de groupie est déjà prise. » elle range le bout de papier dans son sac avec une jalousie sans doute feinte mais qui fait sourire keenan. il l'embrasse sur la joue comme pour confirmer qu'elle est sa seule groupie qui vaille la peine -sans oublier agnès, mais c'est une autre histoire.
keenan suit liv dans une salle aux murs recouverts de miroirs et de portraits, beaucoup moins bondée que la précédente. il lui est plus aisé de respirer ici. liv lui fait remarquer qu'il risque de devenir célèbre, et il hausse les épaules. il en doute, d'autant qu'il n'est pas le moins du monde intéressé par la célébrité. ce qu'il fait, c'est par passion. c'est pour passer le temps, aussi. ça lui paye la drogue, et puis ça l'amuse, c'est tout. il ne veut pas être reconnu dans les rues, surtout qu'il n'a pas intérêt à ce qu'on le retrouve après sa fuite musclée du centre de désintoxication. « je n'y peux rien, je suis adorable. mais il ne faut pas compter sur moi pour réapparaître dans ce genre de soirée de si tôt. encore moins si ma nouvelle amie y est aussi, ça me fait beaucoup de peine de lui briser le cœur mais elle n'est pas mon genre. » il sourit à nouveau, puis jette un coup d'oeil à la coupe que tient liv. il n'a pas comptée, est-ce sa seconde ou sa troisième ? quoi qu'il en soit, il n'est pas certain qu'elle puisse tenir longtemps en buvant à un rythme soutenu. qu'il sache, elle n'est heureusement pas comme lui. « toi, si tu continues à boire, tu vas devenir pire que moi. » il se moque un peu, c'est vrai, mais ce n'est pas méchant.

il semble capable de tout faire, tout surmonter, de s'adapter à n'importe quoi. il lui suffit d'un peu d'assurance et de beaucoup d'humour pour donner cette impression. il lui suffit de sourire, c'est tout simple. c'est son don, le mimétisme, son talent à peine caché. caldwell est une espèce en voie de disparition, il est tout seul, il lui faut s'adapter. il a toujours été doué pour ça, dès son plus jeune âge il faisait comme les autres pour paraître normal. pour être bien vu. il lui a suffi de choisir le groupe le plus intéressant, le mieux vu, et de s'y adapter. il a toujours fait ça. du moins, jusqu'à son installation à white oak station, depuis laquelle il est tout simplement lui-même. il va à contre-courant, il se fout pas mal des jugements, du regard des autres. il ne fait l'effort que ce soir, pour liv. habituellement, il s'auto-exclu de certains groupes, et se mêle sans gêne à d'autres. il ne fait plus l'effort de faire semblant, de se camoufler, il reste keenan. c'est aussi simple que plaisant. il aime bien ce qu'il est, il s'y est fait. on peut tout apprendre, même être soi-même.
ils approchent du buffet, ce qui n'est pas pour déplaire à keenan. c'est sans doute le second amour de sa vie, juste après la musique. les deux se talonnent. il a une vie des plus simple, des plaisirs simples, des besoins encore plus simples. manger, boire, dormir, jouer, fumer, cela lui suffit. il n'a besoin ni de voyager, ni d'avoir beaucoup d'argent, une vaste demeure, dix voitures et trois majordomes. il se fiche pas mal de l'argent, de l'impression qu'il donne. simple. « je ne mange pas les gens. enfin, pas encore, mais si on manque de nourriture je deviendrai cannibale sans le moindre problème. la survie avant tout. » serait-il capable de se la jouer hannibal lecter pour survivre ? peut-être, bien que chez les caldwell l'instinct de survie ne soit pas très développé. c'est plutôt l'inverse, se détruire à petit feu. drogue, alcool, inconscience, il n'a pas le profil du type qui veut vivre à tout prix. et pourtant, c'est un survivant. à sa manière. il a dépassé l'absence du père, la dépendance de la mère, son décès. il s'est évadé de sa prison de désintoxication, et même si cela signifie se défoncer jusqu'à en crever, c'est son choix. il vit de sa passion, il se débrouille. on peut dire qu'il survit.

« je prends ça pour un oui », sourit-il, plutôt ravi, une fois de retour auprès de liv. il aime cette impression, illusion, de lui être essentiel. il n'y croit pas plus d'une seconde, mais la seconde se trouve être agréable. keenan ne se prend pas la tête à y réfléchir plus longtemps, ce n'est pas son genre. il n'aime pas ça, réfléchir, de toutes manières. agir est non seulement plus facile, mais aussi moins chiant. il vise la facilité et le moindre effort, je-m’en-foutiste jusqu'au bout. elle est facile, la vie. même ce soir, entouré de personnes qu'il n'apprécie par le moins du monde, il n'a pas à se plaindre.
dans le but d'éviter eleanor, nouvelle "amie" collante et flippante, keen se laisse guider par son amie jusqu'à une salle bien moins bondée. il se trouve directement plus détendu. moins crispé, c'est toujours mieux. liv plaisante sur le fait qu'il pourrait devenir célèbre vu ses nouvelles connaissances, mais son aisance n'est que poudre aux yeux, comme tout ce soir. il a un million de bonnes raisons pour ne pas vouloir passer de l'ombre à la lumière. il aime bien ça, l'ombre, être sous les projecteurs ne l'intéresse pas, encore moins si cela signifie traîner à nouveau en ce genre de lieu. il n'a pas l'intention de devenir le genre d'homme qui le répugne, quelle logique y aurait-il là-dedans ? « je dirais même que tu es à croquer, monsieur caldwell. » sourit-elle en lui pinçant la joue, ce qui lui tire un léger sourire. il ne fait que cela, de toutes manières, sourire, depuis qu'il l'a rejointe chez elle. « rien que ça ! » l'euphorie de liv laisse brièvement place à la tristesse sur ses traits, alors qu'elle se désole du refus de keenan à participer à d'autres événements du genre. ce n'est pas son monde, ce n'est pas lui, et ça ne lui plait pas vraiment. oh, il lui plait de tenir compagnie à son amie, il n'y a aucune doute à avoir là-dessus, mais c'est tout de même au dessus de ses forces que de faire tant d'efforts plus d'une fois. le costume l'oppresse, sans parler du nœud papillon. les gens l'irritent et il ne peut rien dire. et puis il se concentre tellement pour changer les idées de liv qu'il ne saurait dire s'il s'amuse. ce qui, pourtant, ne le dérange pas. n'est-il pas là pour ça ? « on s'amuse bien, mais tu reviendras avec ton mari et tu lui montreras comment on s'amuse à la caldwell. » sa famille, c'est la débauche et la déconne. c'était. et puis sa famille, plutôt sa mère et lui. il se souvient à peine de sa tante, chez qui il a pourtant vécu un moment. quant à son père, un vrai mystère...

« moui ! dans le noir, tout le monde se plait tu sais. » son regard et son rire ne trompent pas. keenan rit doucement, bien que pas d'accord du tout. mettons cela sur le compte des coupes qu'elle a déjà vidées, alors que keenan n'en est qu'à sa première. il est pourtant pas mal alcoolique, keen. mais le champagne, pas trop son truc. évidemment, lorsqu'on passe sa vie à se saouler, le champagne ne fait aucune effet. « mais je suis nyctalope. » il contrecarre n'importe comment, comme à son habitude. ce qu'il raconte n'a pas d'importance, tant qu'il y met de la conviction. cela fait de lui un menteur hors pair. une énième défaut qui peut s'avérer utile, et surtout dans lequel il excelle. un vrai thug.
liv tente de compter le nombre de coupes qu'il lui faudra avant d'atteindre le même niveau de folie -connerie ? - que lui. il est vrai qu'elle est loin du compte, mais elle est tout de même partie. « t'en fais pas je vais me faire un plaisir de compter le nombre de coupes qu'il va te falloir avant de disjoncter. » tout en espérant qu'il n'aura pas à en dénombrer trop. autant qu'elle ne finisse pas totalement saoule, il est aussi là pour ça. elle lui annonce qu'il va lui falloir danser. danser. mettre un costume, sourire à tout le monde, faire bonne figure, discuter de la vie d'inconnus, et maintenant danser ? il la regarde avec des yeux ronds. danser... en a-t-elle encore beaucoup, des bonnes nouvelles ? il se reprend pourtant: « danser d'accord, mais avec toi... » le pire ? il est fier de lui. il lui sourit, de toutes ses dents, un vrai gamin. il est le pire adulte qu'on ait jamais vu, le moins responsable, le moins sérieux, le moins adapté à sa condition, et aux circonstances actuelles. une soirée mondaine, à laquelle il doit se montrer sous son meilleur jour. alors qu'être civilisé, c'est déjà beaucoup lui demander.
son élan de fierté est interrompu par les joues rougies de liv alors qu'elle est presque foudroyée du regard par un couple d'autres inconnus snobs. « rire, tu n'as pas honte ? » fait-il en levant les yeux au ciel, tout ce qu'il y a de plus ironique. il est déjà blasé de l'environnement dans lequel ils se trouvent. dégoulinant de fausseté, d'hypocrisie, d'argent. tout ce qu'il déteste. et liv qui se coltine ce genre d'événement il ne sait combien de fois par an.