Aujourd'hui est une journée comme les autres. Ensoleillée, un bon vingt-cinq degrés dehors. Les gens se prélassent dans les parc, sortent se balader, faire du vélo. L'été est bien là. Ça se lit sur les visages, sur les tenues vestimentaires des passants. On sort les jupes, les shorts, les bermudas. L'air est embaumé des odeurs de viande grillée, des barbecues entre amis. Le soleil se couche plus tard, les apéros s'éternisent, on profite de la fraîcheur le soir.

Il est environ dix-huit heures trente, et je m’apprête à fermer la boutique dans la quelle je travaille. J'ai aujourd'hui beaucoup sympathisé avec un client, un type de deux ans mon aîné, nommé Julian. Le pauvre cherchait un cadeau spécial pour une fille qu'il apprécie beaucoup, et il s'est donc dirigé vers le disquaire où je travaille sans trop savoir quoi acheté. Il a été un client indécis, mais j'ai su trouvé les arguments pour l'aiguiller dans son choix - et aussi pour qu'il puisse faire le meilleur cadeau à la fille en question, une certaine Maxym.

Comme il est l'heure de fermer, je fais un rapide tour de la boutique, vérifie la caisse, ferme l'avant de la boutique, et passe prendre mes affaires dans la réserve. Je sors par la porte de service, et me retrouve dans la rue. Je m'arrête pour m'allumer une clope, puis je pars en direction de mon appartement. Le trajet n'est pas très long, une dizaine de minutes, à peine. Puis, alors que je suis  à une rue de chez moi, j'entends des injures, des impacts, comme des coups qu'on donne. Raaah, j'aime pas ça, mais quelqu'un est certainement dans la merde, alors je me dirige dans la rue d'où proviennent ces sons.

Et là, je retrouve un de mes amis, Nathan, le visage en sang, assis contre le mur, à moitié inconscient.

« Putain, Nathan ! »

J'accours vers lui, et m'abaisse à son niveau. Je soulève avec mes doigts sa tignasse brune et bouclée. Il a le nez en sang et des bleus partout. Je regarde à droite et à gauche, en espérant voir une trace de son agresseur. Mais il n'y a personne. Je me tourne vers Nathan à nouveau.

« Oh, Nathan, bouge-toi ! »

Il ne répond qu'un ensemble de syllabes inaudibles. Bon, je crois que je n'ai pas le choix. Je prend son bras et tente de le mettre debout, tant bien que mal. Je crois qu'il comprend ce que j'essaie de faire puisqu'il met son bras autour de mon cou, et prend appui sur moi. Heureusement, qu'il n'est pas très lourd et que mon appart n'est pas loin.

Quelques dizaines de minutes plus tard, nous voilà enfin dans l'appart. J'ai fait s'asseoir Nathan dans le vieux fauteuil fatigué de mon salon, et je suis assise en face de lui sur un tabouret, ma trousse à pharmacie sur les genoux. Je regarde son visage, et je ne sais pas par quoi commencer. Bon, on va d'abord nettoyer ses petites plaies, puis on s'occupera de son nez après. Je prends une grosse boule de coton, et l'imbibe de désinfectant avant de l'appliquer par petites touches sur ses plaies au visage. C'est alors que Nathan reprend peu à peu conscience et forme des phrases audibles. Il croit être au paradis, et du coup, me demande de l'embrasser en tendant les lèvres.

Ce mec restera toute sa vie - et toute sa mort - un choppeur. Il a une bite à la place du cerveau, et ce quelles que soient les circonstances.

« T'es con. Même à moitié dans les vappes, tu penses qu'à pécho, toi..., dis-je, tandis que je continue à désinfecter ses plaies, On est chez moi, là, tu t'es fait tabasser dans une ruelle, pour je ne sais quelle raison, encore... »

Une fois les plaies "superficielles" terminées, il faut passer au pire, son nez qui pisse le sang. Je prends un gros morceau de coton pour nettoyer un peu le sang qui a coulé, puis en prend un autre morceau que je glisse dans son nez - la classe. Nathan a toujours les yeux fermés, mais je le secoue un peu.

« Faudrait que t'appuies sur ton nez pour faire un point de compression, pour que ça s'arrête de saigner... »

Pendant que je le soigne, Nathan se plaint et montre son mécontentement par des jurons de temps à autres. Cela me fait rire, alors parfois, j'imbibe - peut-être un peu trop - le coton de désinfectant, juste pour l'embêter. Puis, une fois le coton dans son nez, mon patient décide de m'obéir et fait pression sur sa narine. Suite à quoi, Nathan me menace de se venger terriblement si je répétais à qui que ce soit toute cette histoire - ce qui est totalement mon genre, bien sûr. Puis, c'est sûr qu'il me fait peur, il a l'air vraiment terrifiant là, à moitié dans les vappes, et un bout de coton dans le nez.

« Oui, oui, bien sûr... », dis-je, un sourire narquois aux lèvres.

Je range ma trousse à pharmacie, silencieusement, avant de la replacer dans le placard sous l'évier de la cuisine, à quelques mètres du coin salon, et me lave les mains avec précaution - quoi, on sait jamais, avec toutes les meufs qu'ils s'est tapés, il aurait très bien pu choper un truc ! Pendant ce temps, j'entends Nathan déblatérer des conneries - pour changer. Moi, déguisée en infirmière, ou en policière, par exemple. Je soupire, à la fois exaspérée par sa bêtise, mais aussi car je trouve l'idée absurde.

Je retourne vers mon ami, et prends mon paquet de clopes posé sur la table basse, tout près. Je sors une cigarette que je porte à mes lèvres, avant de l'allumer avec une allumette. Je tire une taffe, avant de lancer à Nathan, rentrant dans son jeu :

« Pas besoin de déguisement, je me suffis à moi-même... »

Je recrache la fumée, un sourire aux lèvres. Mon ami sort peu à peu du coma, ou du moins assez pour me raconter son aventure du jour. Il s'est juste fait latter la gueule par le fils de Chuck Norris, lors d'une vente de weed. Toujours à se mettre dans la merde, celui-là. Mais en parlant de beuh, ça faisait bien longtemps que j'en avais pas fumée... Peut-être Nathan saurait-il me dépanner ?

« T'arrives toujours à te mettre dans la merde, toi. D'ailleurs, t'aurais pas un dix balles sur toi ? », demande-je simplement.

Je retire une taffe sur ma clope.

« Je te prépare un bon petit repas, en échange. », lui souris-je.

Après tout, après la musique, la cuisine était l'un de mes passe-temps favoris. Ça me détendait, me reposait. Dès mon plus jeune âge, j'ai dû me démerder à faire à manger pour mon père et moi, trop ivre pour pouvoir faire cuire un steak hâché et des pâtes. Et j'y ai pris goût petit à petit, devenant ainsi plutôt bonne cuisinière. Je suis sûre que je saurais faire quelque chose d'assez bon qui puisse convaincre Nathan de fumer un petit joint avec moi.

Le deal que je propose à Nathan semble lui convenir, puisque lorsque je lui dis qu'il peut rester dîner ici en échange, il recrache la fumée de sa cigarette dans un large sourire. Ses paroles me le confirment. Néanmoins, il y ajoute une condition, celle de passer la nuit ici, également. Je ne peux réprimer un éclat de rire, avant de tirer sur ma cigarette : il ne s'arrêtera donc jamais.

« Tu t'arrêtes jamais, hein ? M'enfin, c'est d'accord. Tu dormiras par terre... », dis-je dans un sourire en coin.

Cela ne me dérange pas que Nathan reste dormir ici cette nuit. Après tout, je passe souvent mes soirées seule, après le taff, et un peu de compagnie comme celle de mon ami me fait toujours plaisir. Même si sa connerie m'exaspère parfois, il me fait toujours rire, de part sa nonchalance et son côté "je cherche à te choper de toutes les façons possibles" me "flatte" légèrement. C'est toujours agréable de savoir qu'une personne vous désire - même si ce n'est que purement sexuel - et j'aime parfois jouer avec ça, en mode "je suis inaccessible, you know".

Nathan sort alors un petit pochon de son blouson et le jette sur la table basse qui nous sépare, en ma direction. Je le prends entre mes doigts et observe son contenu, distraitement. Je pense qu'il y a un peu plus que dix balles, mais bon. On ne va quand même pas s'en plaindre ! Je remercie mon ami avec un petit sourire. C'est sûr que j'aurai de quoi faire ! Ca faisait tellement longtemps que je n'avais pas fumé - de joints bien sûr, la clope, j'en fume facilement un demi-paquet par jour.

C'est alors que l'estomac de Nathan décide de crier son mécontentement par un gargouillement particulièrement audible, ce qui ne manque pas de me faire rire légèrement. D'ailleurs, mon ami d'enfance ne perd pas le nord, et me demande ce que je compte lui servir à manger. Bonne question... Nathan espère me voir en string sous mon tablier. J'esquisse un nouveau sourire tout en tirant une nouvelle fois sur ma cigarette.

« Désolée, mais je me balade la plupart du temps sans sous-vêtements, tu sais... » réponds-je, pour le provoquer. Ce qui est absolument faux, bien sûr. Je suis pas vraiment du genre à me balader à poil. Bon, il est vrai que je mets rarement de soutien-gorge, surtout l'été - au vu du peu de poitrine que Mère Nature a bien voulu me céder. Je me lève, et me dirige vers la cuisine, clope au bec.

« Et puis, je ne mets pas de tablier non plus, renchéris-je, tu aimes la cuisine asiatique ? Ou alors... je peux faire du risotto, mais c'est beaucoup plus long... Oui, définitivement, on va faire des nouilles sautées au wok, continue-je, plus pour moi-même que pour Nathan. Oh, et puis t'as qu'à rouler le pilon pendant que je cuisine, il y a du tabac à rouler dans le tiroir de la table basse, débrouille-toi pour le toncard... »

Je me mets alors en quête des ingrédients dont j'ai besoin pour ma recette. J'adore cuisiner, et je suis capable d'improviser n'importe quel plat, tant que j'ai les bases dans mon placards. Je sors un wok, que je place sur ma cuisinière tout juste allumée, et jette un peu d'huile et de beurre dedans. Puis, pendant que ça chauffe, je découpe, quelques poivrons, oignons, et carottes. Je mets à chauffer une casserole d'eau également, dans le but d'y faire cuire les nouilles chinoises dans quelques minutes.

Quelques minutes plus tard, tout mon appartement s'embaume d'une alléchante odeur. Je fais sauter mes légumes une dernière fois, avant d'y incorporer mes pâtes tout juste cuites. Je laisse ça de côté, et cherche dans mes placards sets de tables, bols, et couverts. Je dispose le tout harmonieusement sur la table non loin de la cuisine, et observe Nathan rouler du coin de l'oeil. Ah, pour ça, il n'est pas blessé non plus ! Je dépose le plat au centre de la table avant d'annoncer avec un sourire :

« À table ! »

Mon ami d'enfance me rejoint, un léger sourire aux lèvres, et soupire de satisfaction en humant la bonne odeur qui émane de la cuisine. Son sourire s'élargit un peu plus avant de me demander s'il y avait un peu d'alcool pour accompagner notre repas. La dernière fois que j'avais bu, ça s'était plutôt mal terminé : c'était avec James, et je crois bien qu'on a vidé la "cave" entière. Et les conséquences de cette beuverie sont aujourd'hui dramatique, puisque je me retrouve avec un polichinelle dans le tiroir - plus pour très longtemps certes, mais tout de même. Je secoue légèrement la tête pour chasser de mes pensées toute cette histoire, ma grossesse, tout ça. Je ne souhaitais pas y penser, pas ce soir.

« Je crois qu'il me reste une bouteille de rosé dans la frigo, attends deux secondes. », dis-je en m'éloignant. J'ouvre le réfrigérateur et, par chance, trouve la bouteille intacte. Je décide de l'ouvrir et ramène deux verres à pieds sur la table, avant de m'installer bien confortablement sur ma chaise. Mon ventre gargouille légèrement, signe que moi aussi, je commence à avoir faim. « Par contre, je ne sais pas s'il me reste de l'alcool fort, on verra ça tout à l'heure. »

Nathan s'installe en face de moi, et attrape la cuillère pour se servir avec une telle vitesse qu'on dirait qu'il n'a pas mangé depuis des semaines ! Cela me fait sourire légèrement. Il agit vraiment comme un enfant par moment. Néanmoins, le jeune homme semble se raviser et prend mon assiette pour me servir. Je laisse échapper un petit rire.

« Tu me diras stop. » dit-il, alors qu'il dépose une première cuillère dans mon assiette. « Quel gentleman... », souris-je, taquine.

Une fois mon assiette remplie, je fais signe à Nathan que j'en ai assez, et repose mon assiette en face de moi. Celui-ci se sert à son tour, les yeux remplis de gourmandise. Je prends la bouteille de rosé, et décide de remplir nos deux verres à moitié.

« Tu as de la chance, parce que la dernière fois qu'un pote est passé ici, on a vidé presque toutes les bouteilles qu'on a pu trouvé dans l'appart'. », dis-je alors que le liquide remplit nos verres. Et voilà, encore, on y revient. A cette soirée, à tout le bordel qui en découle. Pour ne plus y penser, je prends mon verre et en boit une grande gorgée. « Enfin, ça n'a pas d'importance. », clôture-je.

Je pique ma fourchette dans mon assiette, et l'enfourne dans ma bouche. Qu'il est bon de manger, parfois ! S'il y a bien quelque chose pour laquelle je suis douée, c'est la cuisine. Nathan, lui aussi, a l'air de se régaler. En même temps, je ne suis pas sûre qu'il cuisine lui-même chez lui. Un léger silence s'est installé depuis quelques minutes, alors je décide de le briser en interrogeant mon ami sur ses "affaires".

« Les affaires sont bonnes en ce moment ? »

J'observe mon ami, amusée. Une nouille s'échappe du coin de ses lèvres. Je me rends alors compte que je viens sans doute de le déranger sans sa dégustation religieuse de son repas. Enfin, l'essentiel est qu'il trouve ça bon ! Nathan me répond avec sa désinvolture légendaire. C'est sûr que lui, le fric, c'est pas son principal souci. Ses parents l'achètent avec leur thune. Je sais pas si c'est le meilleur moyen pour le garder près d'eux, mais après tout, ça ne me regarde pas. Et puis, ça arrange bien Nathan, d'après ce qu'il me dit.

« Tu m'étonnes, dis-je, avant d'avaler une nouvelle gorgée de vin. Au moins, t'es à l'abri du besoin. »

Je repose mon verre, sur la table. Nathan et moi discutons de tout et de rien encore quelques minutes, le temps que chacun finisse son assiette. Mon ami ne manque pas de se resservir plusieurs fois, pendant que je peine à terminer mon assiette. Je n'ai jamais eu un appétit très important. Puis, une fois la table débarrassée, et le vaisselle faite, nous nous installons dans mon salon, lui dans mon canapé, et moi juste en face, dans le fauteuil que j'ai récupéré dans l'appartement de mon père.

Pendant que mon ami allume le joint que nous nous apprêtons à fumer, je cherche un vinyle à passer dans le tourne disque. J'hésite quelques instants, avant de choisir du jazz, puis retourne à ma place. L'odeur si caractéristique de la marijuana emplit doucement la pièce. Mon ami tire quelques lattes, en silence, avant de me tendre le pilon. J'en tire une bouffée, puis recrache la fumée doucement.

« Et sinon, il se passe quoi dans ta vie, en ce moment ?, dis-je, après avoir tiré une seconde taffe, aller, quoi, je suis sûre que c'est palpitant ! En tout cas, ça doit être certainement moins catastrophique que la mienne... »

Alors que mon ami me parle - et que la drogue embrume tranquillement mes neurones - je me rends compte qu'il manque quelque chose sur la table.

« Merde, Nathan ! On a rien à boire ! », m'exclame-je, en lui tendant le joint.

Je me lève alors, un peu précipitamment, comme si la table vide qui nous séparait était une abomination, et accoure vers le bar dans la cuisine. Je fouille, fouille... et trouve - enfin ! - dans un recoin, une bouteille de whisky à moitié bide.

« Ah, fraté, t'as de la chance, on a une rescapée ! », lui crie-je. Je file ensuite récupérer deux verres dans la cuisine et les pose sur la table basse qui nous sépare, ainsi que la bouteille de whisky, et m'affale dans mon fauteuil.

« Servez-moi donc un verre, gentleman ! », dis-je, un sourire béat aux lèvres.

J'entends mon ami me parler d'une fille. Ce n'est pas nouveau, surtout chez Nathan, car les filles pour lui, ça ne résume qu'à un jeu, un divertissement. Néanmoins, la façon dont il m'en parle m'interpelle un peu. D'habitude, il me raconte plutôt comment il s'est barré sans laisser de trace le lendemain, ou comment est-ce qu'il a réussi à la mettre dans son lit dans le plus court laps de temps. Mais là, ce n'est pas "n'importe quelle fille", selon lui.

J'essaie d'écouter Nathan attentivement, alors que je prends la bouteille de whisky et les verres dans la cuisine, chose plutôt compliquée lorsque la drogue brouille doucement les connexions dans ton cerveau, et reviens m'affaler dans le fauteuil du salon avant de lui demander de me servir un verre. Mon ami m'explique qu'il m'offrira certainement de quoi boire pour Noël, avant de remplir mon verre de whisky - plus qu'il n'en faut. Je le porte à mes lèvres avant d'en avaler une gorgée.

« Offre moi plutôt un biberon ou un truc du genre, je risque d'en avoir besoin..., dis-je, en riant un peu nerveusement. Aaah putain, mais ferme ta gueule, e.b., vraiment. Tiens, fais-moi passer le joint plutôt ! »

Mon ami me le tend, et je le porte aussitôt à mes lèvres pour en tirer une latte. Un silence plutôt gêné s'installe. Je repense à la fille dont Nathan m'avait parlé quelques minutes plus tôt, et en profite pour relancer la conversation :

« Cette fille... Elle assurait tellement bien au lit pour que t'en parles comme ça ?, lui souris-je, à moitié sérieuse, ou alors t'as même pas couché avec elle, c'est ça ? »

Ça serait bien une première. Je tapote légèrement le joint sur le bord du cendrier pour en faire tomber la cendre avant de tirer une nouvelle fois dessus, recrachant l'épaisse fumée quelques secondes plus tard. Je sens mon esprit s'embrumer petit à petit, faisant totalement disparaître la censure que je pouvais parfois m'imposer.

« M'enfin, t'as l'air de bien l'aimer quand même, même si tu dis que t'es "à deux doigts" de l'apprécier. Je te le dis, ça pue l'histoire compliquée ça, et y a rien de pire, vraiment., soupire-je, avant de lui rendre le joint, de nouveau. Haha, je parle trop comme une vieille femme, excuse-moi. »

Je passe une main dans mes cheveux, avant de boire une nouvelle gorgée de whisky. Je pense alors à James, que je n'ai pas revu depuis plusieurs semaines déjà. Entre nous, c'était bien plus que compliqué, en effet. Nous ne sommes plus amis, mais je porte toujours en moi la conséquence d'une nuit de beuverie à n'en plus finir. Je n'avais toujours pas fait mon choix, concernant cette petite chose... Préférant oublier, je finis alors mon verre, cul sec, attendant que mon ami me donne quelques explications.

« Je n'ai pas couché avec elle. Et je t'assure que ce n'est pas prêt d'arriver. » Je ris légèrement : « Tiens, c'est nouveau ça ? » Nathan me repasse le joint, sur lequel je tire une taffe. Je l'observe s'enfoncer doucement dans le canapé, et ses mains de faire de même dans ses poches. Il me décrit alors cette fille, pourquoi elle l'attire, ce qui l'énerve chez elle. Pour une fois, j'ai l'impression qu'il me décrit une femme, et pas un bout de viande, comme il en a l'habitude. Je l'écoute un peu distraitement, tirant une nouvelle bouffée sur le pilon que nous fumons. Il finit alors son verre cul sec, avant de repartir dans son explication, comparant la fille dont il me peint le portrait depuis tout à l'heure à une sorcière. Je ne peux pas m'empêcher de rire un peu bêtement, le trouvant un peu cliché et naïf à la fois. La drogue me monte au cerveau. Nathan se serre un autre verre de whisky, alors j'en profite :

« Tiens, ressert m'en un, tu seras mignon. »

Mon ami d'enfance fait couler le liquide doré dans mon verre, et je le remercie. J'en avale une gorgée, tandis que mon ami m'observe. Il pose son breuvage, s'accoude sur la table, son menton dans ses mains. Contre toute attente, Nathan ma demande conseil, sans faire une petite allusion à ses nombreuses tentatives de voir ce qu'il y avait sous ma ceinture. J'éclate de rire, et pose mon verre sur la table, avant de venir m'asseoir dans le canapé à côté de lui, le joint à la bouche.

« Peut-être qu'on pourrait vérifier tout de suite, qu'est-ce que t'en penses Wheeler ? », souris-je, taquine. Ma voix est suave, mon cerveau totalement embrumé par l'alcool et la drogue.

Mes deux jambes toutes maigres passent de chaque côté de celles de Nathan, et me voilà assise sur ses genoux, face à lui. Je tire une dernier latte sur le joint, avant de le glisser entre ses lèvres. Je recrache doucement la fumée, avant d'enfouir mon visage dans son cou et d'y déposer quelques baisers. Mes mains se glissent doucement sous son tee-shirt. Alors, je m'arrête, sourire aux lèvres, et le fixe du regard.

« Non, je rigole. »

Puis, je bascule de l'autre côté, m'enfonçant moi aussi dans le canapé, en riant. Je prends mon verre de nouveau dans la main, avant d'en descendre plusieurs gorgées. La défonce me rend toujours imprévisible, et un peu... débile, il faut le dire. Carrément désinhibée aussi. Je décide de me fumer une clope, pour laisser tranquillement mon ami finir le joint. Alors que j'en sors une du paquet, et l'allume à mes lèvres, je dis :

« Pour en revenir à ta nana, là... je sais pas si je serai de très bon conseil. Tu sais, je suis pas tellement le genre de meuf à courir les gonz, le dernier avec lequel je suis sorti s'est noyé, donc bon... » Elsa Beth, toujours le mot qu'il faut. Je soupire face à ma propre connerie. Ça faisait un moment que Chase n'était pas revenu hanté mon esprit. Dans les pires moments, j'hallucinais, il apparaissait devant moi, me parlait, alors que j'étais pleinement éveillée. Je secoue la tête pour chasser cette pensée. Manquerait plus que je parte en bad. Je reprends alors :

« Enfin, si cette nana te résiste, ça veut dire que t'en as trouvé au moins une qui se respecte haha. Je veux dire, comparée aux autre bouts de viande que t'as côtoyé. Mais, si elle résiste, ça veut dire que cette attirance est réciproque quelque part non ? Puis, elle doit être assez intéressante pour toi, si t'as pas encore couché avec. Je te dis pas que c'est peut-être l'amour de ta vie hein, mais la situation est assez inhabituelle, du coup elle mérite peut-être un peu plus d'attention que d'habitude, non ? »

Je tire une nouvelle taffe sur ma clope, ignorant comme j'ai pu faire pour aligner autant de mots et leur donnant un sens quelconque. Enfin, même si ça ne veut rien dire, Nathan devrait se contenter de ça !