~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Le lycée, c'était une période étrange de ma vie. Le début s'est passé tranquillement, le milieu a été plein de changements et à la fin il y avait des soirs où je ne me souvenais même plus de mon nom. J'avais des amis qui ressemblaient plus à une cour de poulets, mais que j'aimais quand même l'air de rien, parce qu'ils me faisaient croire que je vivais une vie tout ce qu'il y a de plus naturelle. Mes notes étaient de correctes à bonnes, par un digne miracle de l'Univers. Je continuais de bosser, mais souvent qu'à moitié. Vous avez remarqué ? Ma vie est remplie de 'mais'. On s'y fait. Ma famille adoptive me supportait plus qu'ils ne m'aimaient. Alors je faisais ma vie de façon simple ; je vivais au jour le jour, je faisais la fête quand on me le proposait, je bossais quand j'étais à l'école, je devenais une garce quand il le fallait, un ange quand c'était nécessaire, une fille bizarre quand tout me semblait trop ennuyant. C'était ça ma vie au lycée. Une suite de problèmes, de faux sourires, de rires crispés, de boissons, de musiques, d'odeur de transpiration, de shopping, de cris hystériques, de pleurs, de grands silences froids et sans pitié. Bref, l'adolescence quoi.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
Heureuse. Quel drôle de mot. Suis-je heureuse ? Je ne sais pas. Je vis, c'est déjà bien. Je m'estime heureuse de tenir debout, d'avoir un toit au dessus de ma tête, de l'argent qui rentre et à manger dans mon assiette. C'est une nouvelle vie pour moi dans une nouvelle ville. Alors … Tout change. Tout me semble nouveau et excitant. Je rêve de découvrir qui est la vraie Oneida. De tester mes limites, voir combien de temps je peux survivre sans l'aide de personne. Enfin non. Mais oui. Juste repartir de zéro. Donc je ne suis pas heureuse, je crois. Mais je profite d'une nouvelle chance, un nouvel envol, dans un endroit où personne ne sait qui je suis, personne ne sait pour mes problèmes, pour les rumeurs, pour … tout. Qu'on ne me regarde plus avec pitié, avec haine, avec jalousie. Qu'on me juge sur la nouvelle moi. Ce qui est déjà un énorme pas en avant, n'est-ce pas ? Enfin à mes yeux. Et ça y est, je m'embrouille ! Vive la vie, les gars.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Dix ans … Hum, il y a dix ans j'étais une petite fille perdue, à peine arrivée dans sa famille d'adoption après avoir été battue par son père. Et là je suis serveuse dans un autre pays, libre de faire tout ce que je veux. Il peut se passer beaucoup de choses en dix ans. Dans l'idéal … Je me vois sur une plage, bikini et cocktail, avec un serveur qui roule les 'r' et un soleil étincelant. J'aime les plages. Et si je pouvais, je partirais. Si ce n'est pas au soleil, j'aimerai bien la Russie. L'Europe. L'Australie même. Juste m'amuser. Avoir un petit copain, ce serait sympa aussi, mais ça c'est beaucoup moins urgent. Donc dans dix ans … Un vrai métier, un appartement plus grand, une plage et un cocktail. Ça peut sembler futile, et ça l'est sûrement, mais là comme ça c'est la seule image que j'ai en tête. Après, avec des amies, un chat et un grand soleil je suis heureuse, il ne m'en faut pas beaucoup. Donc dans dix ans … Juste heureuse. En train de profiter au maximum de tout ce que la vie à à offrir. C'est un peu ce dont on rêve tous, dans le fond, non ? Être libre. Et bien dans son esprit. Les deux critères requis pour profiter, par Oneida Tates, merci pas d'applaudissement.

PRÉNOM ET/OU PSEUDO: TNF suffit (a) ÂGE: Assez grande pour boire, mais pas assez pour conduire. (encore heureux !) PAYS: Belgique. PRÉSENCE: 6/7 en général. (faut bien faire semblant d'avoir une vie sociale !) COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM? Je louche dessus puis un bail.  PERSONNAGE INVENTÉ OU SCÉNARIO? Inventé. AUTRE CHOSE À AJOUTER?   Pik-atchoum !

Quand j'étais petite, j'ai rencontré un ange. Elle courait sur la plage, ses pieds nus laissant des traces de pas sur le sable humide. Elle souriait, d'un sourire doux comme la brise et chaud comme le soleil. Ses cheveux étaient presque blancs, sa peau aussi pâle que les nuages tout là-haut dans le ciel. Elle courait, mais dans ma tête elle volait. Elle touchait à peine terre, elle était belle, elle était magique. Dans ma langue natale, on dit « angeni » et dans mon cœur, elle est restée Angeni. Je n'ai jamais connu son vrai nom. Son âge. Qui elle était. Tout ce dont je me souviens, c'est l'odeur de la mer. Son aura resplendissante. Ses petits pieds qui jouaient dans l'eau. Sa robe rosée qui ondulait dans le vent. Le soleil qui passait sur ses bras quand elle les levait haut vers le ciel. Et sa voix. Son rire. Quand elle avait tourné ses yeux turquoises vers moi et avait rit en me demandant de jouer avec elle, de sa voix cristalline. Angeni. Mon angeni. Je ne l'ai vu qu'une fois, cette fameuse après-midi, à la lumière éclatante d'un jour d'été. On s'est quitté au soir et elle n'est plus jamais réapparut. Quelque part, c'était peut-être vraiment un ange. Une espèce d'ange gardien, arrivée pile quand j'en avais eu besoin. J'avais courut si vite, pleurer tellement fort, que les esprits m'avaient envoyés un ange rien que pour moi. Une bouffée de fraîcheur et de courage pour me permettre de me relever. De laisser ce bout de plage et de rentrer dans ma petite maison où tout était trop froid, trop chaud et trop tiède. Mur froid, cuir tiède et sang chaud. Regards froids, mains tièdes et cris brûlants. Tout était trop dur dans cette maison. Trop triste. J'avais courus tellement vite ce jour là, j'avais eu tellement peur. Peut-être que c'était pour ça qu'on m'avait envoyé mon angeni. Pour me donner un peu de courage. Me montrer qu'il n'y a pas que de l'ombre et de la souffrance dans ce monde de brutes. Qu'il y avait autre chose qu'une rivière de larmes, un arbre de sang et une montagne de rage. Qu'on pouvait y trouver une petite fille douce comme une fleur de printemps. Quand j'étais petite, j'étais sûre que rien n'allait, que le monde se résumait à sourire en classe et pleurer à la maison. Je croyais que je menais une vie normale. Que voir maman supplier, papa rigoler, mamie tomber, c'était normal. Que tout les croassements des corbeaux sur la barrière du jardin était un cri d'espoir. Que le sol froid était le seul remède à mes bobos. J'y croyais vraiment. Quand j'étais petite, j'étais un peu conne. Je savais faire un plus un mais je ne faisais que fuir quand ça devenait trop difficile. Mais un jour, quand j'étais petite, j'ai rencontré mon angeni. Couchée sur le dos, faisant un ange dans le sable en agitant ses petits bras et ses longues jambes, elle m'a regardé et m'a raconté la vie. Que si je vivais comme ça, je n'y étais pas obligé. Qu'il y avait des gens qui pouvaient m'aider. Mais c'était normal ! Non ça ne l'était pas. Les coups, les blessures, les pleurs, les problèmes, la douleur, la peur, les crises d'angoisse, les tremblements, les supplications, ce n'étaient pas normal. Les corbeaux ne sont pas gentils. Ce n'était pas normal. Pourquoi ? Pourquoi ? Angeni, dis moi pourquoi. Elle ne savait pas dire pourquoi. Elle savait juste que ça ne fonctionnait pas comme ça. Elle m'a dit que je devrais en parler à une grande personne et qu'on m'aiderait. Que je devais demander à quelqu'un d'autre que papa, maman ou mamie. Que même oncle Rocky n'était pas gentil. Pourtant il était toujours prévenant, toujours souriant. Il me racontait des histoires le soir, caressait mes cheveux et ma joue pour que je dorme bien. Mais Angeni disait que non, je ne devais pas voir oncle Rocky. Mais qui alors ? Mon professeur ? Mais les madames à l'école, elles sont méchantes. Elles m'attrapent par les bras et ça fait mal. Elles crient très fort et sont fâchées tout le temps. Je ne les aimais pas. Alors Angeni m'a dit d'aller voir les voisins. Mais ils font peur et ils ont un gros chiens méchants. Alors les voisins encore à côté. Oui, eux ils sont gentils. Elle m'a dit d'y aller, de leur montrer mes bobos. Puis elle a courut vers l'eau, a disparut sur un rire et je n'ai plus jamais revu mon angeni.

Quand j'avais quinze ans, j'avais vraiment peur. Depuis neuf ans, je vivais dans une famille qui ne m'acceptait pas vraiment. Ils étaient gentils, souriant, attentionnés. Mais ne m'acceptaient pas. Je le voyais dans leurs silences, dans leurs regards échangés en pensant que je ne le voyais pas, dans leurs discussions à voix basses qui cessaient dés qu'ils me voyaient, cachée dans l'embrasure de la porte. Ils m'aimaient, j'imagine. Mais pas autant qu'ils ne l'espéraient. Nous vivions en colocation. Dans une drôle de colocations à cinq. Les quatre Tates aux visages de poupées, cheveux blonds et yeux bleus avec leur adorable petit animal de compagnie, Oneida aux cheveux presque noirs et aux yeux noisettes. Celle qui employait des mots étrangers, qui avait un attrape-rêve aux pieds de son lit et qui croyait en des esprits qu'ils ne pouvaient voir ou comprendre. J'avais peur de l'école, où tout les gens étaient si différents de ce que j'avais pu connaître. Où les jeunes avaient des écouteurs vissés sur les oreilles, des pantalons au ras des fesses et des cheveux qui partaient dans tout les sens. Ils étaient un peu effrayants, l'air de rien. Ils me regardaient passer simplement parce que je n'avais pas de cheveux roses et un anneau sur la langue. J'avais de bonnes notes, je souriais. Ils ont appris à faire avec. Quand j'avais quinze ans, je me suis dis que j'en avais marre de subir. J'ai pris le taureau par les cornes. Ils ne m'aimaient pas ? J'allais me faire aimer. Ils me trouvaient bizarre ? J'allais l'être encore plus. Je me suis intégrée. J'ai eu des amis, des camarades, des rencontres, des copains, des copines, des dealers, des clients, des tatoueurs, des tricheurs, des intellos sur qui tricher. J'ai été ado. Quand j'avais quinze ans, je me suis lancée dans ce qui serait ma vie pendant cinq ans. J'ai appris ce que c'était que la vie. Je me suis crée ma famille. Une nouvelle identité. Une nouvelle personne. J'aime dire que j'ai fais le phœnix ; le délire de renaissance dans les cendres. J'ai brûler mon passé pour aller de l'avant. Se détruire à ses avantages quand c'est une destruction contrôlée. Quand j'avais quinze ans, j'ai décidé de devenir moi. Et jusqu'à mes vingt ans, je suis restée la même personne. Fêtarde, studieuse, assidue, têtue, parfois un peu stupide, auto-destructrice et un brin narcissique. Je me suis fais tatouée, percée, déchiquetée. J'ai changé de style, de façon de voir le monde, de façon d'être. Je suis devenue une jeune femme. Et y a des fois où ça craint.

Quand j'ai eu vingt ans, j'étais à la fac. J'étudiais les langues mortes, la mythologie, l'histoire. Je sortais toujours le soir, je profitais toujours de la vie. Mais j'étais concentrée dans mes études. Parce que j'aimais ce que je faisais. Je le faisais depuis deux ans, sans anicroches. Mes professeurs me prenaient au sérieux grâce à mes notes, mais ne m'aimaient pas à cause de mon comportement. J'étais shootée au café, je ne tenais debout que par miracle, j'écrivais des dissertations de mille mots sans me souvenir des premiers. Mais je tenais bon. Et ça payait. J'avançais, lentement mais sûrement, dans mes études, dans l'étude de l'histoire de notre monde. Les Tates m'avaient lâchée depuis un moment, ne faisant que me verser de l'argent quand j'en avais besoin. Et c'était très bien comme ça. Quand j'ai eu vingt ans, j'ai rencontré un homme. L'homme de ma vie. Il était grand, il était beau, il était fort, il était prof. Je le trouvais moche, mais m'a captivée, envoûtée, hypnotisée au point que je finisse par le trouver attirant. Que je rêve de lui la nuit. Que j'imagine ses bras autour de moi, ses mains sur moi, ses yeux dans les miens plus longtemps que les deux secondes nécessaires pour que je lui réponde. Je me surpris à l'observer en cachette, à essayer de lui poser des questions après les cours, à essayer de lui parler seul à seul. Sans jamais réussir. Quand j'ai eu vingt ans, j'ai joué avec le feu. Jusqu'à me brûler les ailes. Jusqu'à ce qu'il cède une fois et me jette après, me lance sa culpabilité au visage. Une nuit de folies pour des semaines de hontes, de couloirs sombres, de cours froids, de sadisme pur, de mauvaises notes injustifiées. Une personne peut vous détruire mieux que n'importe quelle armée. Elle peut vous ébranler jusque dans vos fondations, vous laisser brisé, déchiré, détruit de l'intérieur. Elle peut vous faire agoniser, vous regarder dépérir et vous laisser sans vous achever. Une personne peut gâcher une vie. Et quand j'ai eu vingt ans, j'ai souris. J'ai souris contre les coups, j'ai fais pétiller mes yeux en réponses à ses regards sombres, j'ai ris quand il attendait que je pleure, j'ai rendu coup pour coup. J'ai souffert. Mais j'ai fais souffrir. Bien que ça ne me ressemblait pas et que je n'en tirais que plus de souffrance. J'en ai imploser. Les crises d'angoisses que je n'avais plus depuis mes cinq ans sont revenues à plein régime. Mon appétit lui s'est envolé. Je me suis fais souffrir toute seule. Je me suis brûlée trop fort. Quand j'ai eu vingt ans, j'ai finis par faire mes valises. Un sac à dos, de l'argent tiré à la banque et j'ai disparue. J'ai pris un train, puis un autre, puis un car. J'ai roulé, j'ai marché, j'ai fais du stop, j'ai espéré, j'ai prié. Et je suis arrivée. Dans un endroit indéfinissable. Dans une nouvelle ville.

Depuis j'ai vingt et un. Depuis je suis une serveuse. Depuis je cache qui je suis. Depuis, je souris tout les jours. Depuis je redeviens celle que je suis. Depuis je prie chaque jour pour qu'on ne me retrouve pas. Pour que personne ne devine qui je suis. Étrange pour une fille qui, il n'y a pas si longtemps, rêvait encore d'un ange sur une plage en Californie.