~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Le lycée... ah tendre jeunesse. Que ne donnerait-on pas parfois pour retourner sur les bancs de l'école, recevoir de nouveaux les petits mots en papier que les camarades nous griffonnaient pendant que le prof écrivait au tableau. Ces petits avions que Cayden aimaient tant à recevoir. Il n'avait pas l'âme d'un artiste, ou du moins il se la jouait dur mais au fond, il adorait les romances et c'était le côté vieux film des années 20 qui lui manquait terriblement. Comment s'étaient passées ses années de lycéen? Un rêve pour le bad boy de sa promotion. Des conquêtes qu'il ne comptait plus, des amis qui lui léchaient les bottes à longueur de journée. Sportif? Il était dans l'équipe de natation du lycée et dans celle de football. Il adorait le sport pour une raison: cela lui permettait de s'exprimer, d'exprimer toute cett rage de vivre qu'il refoulait. Et évidemment il fréquentait toute l'équipe de football ainsi que les chearleaders!

Une journée type pour l'adolescent? Il se levait à 7h30, enfilait un jeans au hasard, souvent celui qui traînait sur le sol près de la corbeille à linge. Il prenait un croissant dans le panier des pâtisseries fraîches que sa mère avait dû aller chercher avant de filer à l'église et courait pour attraper le bus. Souvent il le ratait et marchait jusqu'à l'école. Sermonné? Jamais. Il était le fils de Monsieur Sevenwood et personne n'en voulait à la gueule d'ange qu'était Sevenwood fils. Il entrait en classe le sac nonchalamment posé sur son épaule, souriait à ses deux acolytes Cameron et Marc et s'asseyait près de la fenêtre. Une place stratégique, la lumière du soleil y venant vers 10h, juste avant le break, au moment où Mister Gips interrogeait, il était assuré de ne pas devoir répondre aux questions. En effet le vieux professeur avait du mal à défier le soleil traversant la vitre et donc à regarder l'impétueux Cayden. Jamais personne n'osait s'asseoir à sa place... Cayden était aimé et on craignait ses amis. Après les cours, il traînait au lycée jusqu'à ce que son père vienne le reprendre. Souvent il se faufilait dans l'arrière-cour et écoutait les petits de la chorale répéter. Et parfois même il se laissait aller à y emmener une fille, elles pensaient toutes qu'il feignait sa sensibilité pour les conquérir mais il adorait vraiment le goût de la romance. Il ne pouvait se permettre de le reconnaître cependant. Il se réfugiait dans une petite cigarette qui lui offrait une sorte de fenêtre vers un monde plus sympathique le temps de quelques minutes. Puis il rentrait chez lui, parlait politique et religion au souper du soir avec ses parents, son frère et sa soeur et puis passait la soirée enfermé dans sa chambre à parler au téléphone ou à surfer sur le net.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?

Le bonheur est un concept surfait. Ceux qui se plaignent sans cesse sont probablement plus heureux qu'ils ne le pensent tandis que ceux qui se taisent et paraissent bien vivre sont certainement ceux qui encaissent les plus terribles souffrances. De quelle catégorie est Cayden? Des taiseux. Si Cayden est heureux... Il vit de son travail pour le moment. Il passe des heures dans un avion qu'il adore piloter, à parcourir les Etats-Unis comme si la vie était tranquille, sereine. Récemment il s'est vu intégrer un programme fédéral et les vols qu'il effectue sont devenus confidentiels. Depuis il s'imagine parfois pourchassé par des avions, il espère devoir atterrir en catastrophe et sauver la vie de quelqu'un d'important. Donner un sens à sa propre vie quoi. Mais en vérité les passagers qu'il transporte sont surtout des agents secrets qui n'ont que des missions légères et parfois qui cherchent juste à se déplacer incognito. Mais il aime leur parler, connaître leur vie et rêver d'en faire autant. Cependant tout cela n'est qu'un monde d'illusions... Et sa propre vie est bien fade. En sortant du lycée, il avait été contacté par une agence de mannequinat, il avait refusé de s'enrôler parce que ce n'était pas la vie qu'il souhaitait. Il y a trois semaines il a téléphoné à l'agence et passé un casting. Il s'ennuie et cherche par dessus tout à oublier les tourments qui l'occupent et l'obsèdent.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Les gens se projettent-ils vraiment à si long terme? Dix ans... Ca semble une éternité. Dans dix ans Cayden espère avoir trouvé le courage de s'être posé à son bureau et d'avoir écrit toutes ces pensées qu'il cogite depuis le lycée. Il espère avoir publié un manuscrit, un roman, qui sait... Il espère arriver à communiquer avec la fille de celle qu'il a tant aimé sans jamais avoir réussi à l'exprimer comme il aurait dû. Selina... Probablement son principal souci, sa plus belle préoccupation. Dans 10 ans il aimerait être le père qu'il n'a pas été jusqu'à présent. Et puis au fond de son coeur, il espère pas mal de choses... Mais dix ans c'est long, très long. Trop long?

La raison et les sentiments. Vivre dans cette infâme impression de ne pas s'appartenir, voilà comment ma jeunesse s'était déroulée. Sur les bancs du lycée... Populaire, adulé, convoité. Ca en faisait rêver plus d'un ce statut de playboy. Et parfois je me mettais à rêver d'être quelqu'un de banal, de normal, qui avait des amis réels. Dans toute cette masse informe de gens qui rôdaient autour de moi comment aurais-je pu percevoir qui en valait la peine? Je ne le savais pas et je devais me fier à mon instinct. Et ce dernier m'avait dit pendant longtemps que tous ceux qui tournaient autour de moi étaient des ahuris, des abrutis que je devais fréquenter si je ne voulais pas me retrouver seul. La solitude était ce que je craignais le plus. Et je n'osais me détacher du confort certain que j'avais. De surcroît, m'en détacher pour aller où? Avec qui? J'aurais dû le faire mais l'éducation, l'habitude, la vie, vous empêchent parfois d'agir comme vous le devriez. Et c'est pendant que j'étais ce parfait connard que je l'ai rencontrée elle: une princesse. J'avais côtoyé plusieurs filles, rarement des relations sérieuses, je n'étais d'ailleurs pas capable de mener une relation durable à terme. L'engagement m'effrayait. Mais je n'avais en vérité jamais trouvé chaussure à mon pied. Le romantisme était une chose révolue, les filles ne voulaient que vous accrocher et vous exhiber. J'étais un trophée que l'on s'arrachait. Cayden, le tombeur de ces dames. Mais elle... elle, elle me plaisait vraiment. Et c'était ce que je ressentais pour elle qui me handicapait comme jamais. Je me rappelle avoir osé, je ne sais comment d'ailleurs, l'inviter à une soirée. Elle avait miraculeusement accepté, je devais être le garçon le plus chanceux et le plus stressé du monde pendant toute une après-midi. Puis le garçon s'est transformé en un trouillard influençable qui est arrivé à la soirée, s'est vu offrir une bière par un camarade et s'est dit qu'en ajouter un ou deux avant l'arrivée de Keira le rendrait plus confiant. Confiant? Oh je ne manquais plus de confiance quand elle est arrivée. J'avais perdu toute ma gêne... Je ne voyais plus que ses beaux yeux et je m'y plongeais en oubliant le reste du monde. Je désirais son corps mais au delà de cela, je voulais son âme. Je n'avais jamais éprouvé cela. Mais j'étais désespéré. J'avais vécu tant de fois des relations avec des filles qui ne cherchaient qu'à m'attraper, qu'à coucher, que je ne croyais pas qu'elle puisse être plus. Mon instinct m'avait abandonné, mon instinct était noyé sous des litres d'alcool. Les boissons m'avaient aidé à l'embrasser et j'en étais heureux, mais elles me poussaient à être odieux, à abuser de la gentillesse et de la naïveté d'une jeune femme amoureuse. J'étais celui que je détestais, celui que je jugeais à chaque fois que j'entendais des histoires pareilles... Nous avons fini la soirée dans la cabane à outils. J'étais beurré... j'ai fichu ma vie en l'air, la sienne aussi, et surtout toute possibilité d'avoir une relation stable avec l'ange que j'avais enfin rencontré. Elle aurait pu être mon absolution mais j'avais été sa perdition. Je l'avais damnée, et moi avec. Je n'ai plus jamais été le même depuis. J'adore le fruit de nos ébats, j'adore Selina mais... je me sens tellement sale.