Je suis réveillé par les rayons du soleil qui filtrent à travers les carreaux poussiéreux de la maison. Presque aussitôt, un sourire naît sur mon visage. Je me redresse, m'étire puis regarde l'heure. Sept heures. Je gémis faiblement tout en basculant mes jambes sur le côté du lit et en me frottant les yeux, pour me réveiller. Je soupire, regarde par la fenêtre. Un soleil déjà resplendissant éclaire le désert et sa végétation de cactus et de buissons secs. Mon regard accroche comme toujours à l'attrape-rêves suspendu au-dessus de mon lit. Je pense à Oona. C'est elle qui me l'a fait et qui m'a appris à les faire. Je me lève finalement et descend au rez-de-chaussée ou m'attend déjà Oona, en train de préparer le petit-déjeuner.
Ouh... Que me vaut ce plaisir ? Elle se tourne vers moi avec un sourire.
J'imagine que je suis de bonne humeur... Je souris en haussant les sourcils, puis m'approche d'elle afin de déposer un baiser sur sa joue, tout en la serrant contre moi.
Ça tombe bien, je crois que moi aussi. Oona et moi, c'est une longue histoire. En fait, elle est l'une des premières personnes que j'ai rencontrées de retour en Arizona. Elle habitait avec ses parents dans un petit village perdu dans le désert, non loin de la maison de grand-mère, où je m'étais réfugié. On s'est rencontrés dans la vague épicerie dudit village, et on a rapidement accroché. Elle aussi a des origines amérindiennes et y attache beaucoup d'importance. Alors elle m'a aidé à retrouver mes propres origines. On a parlé légendes, histoires, on a appris à se connaître, nous-mêmes et l'un-l'autre. On est devenus des amis très proches, et ceux assez rapidement. Elle a fini par s'installer chez moi, ne supportant plus sa vie familiale. Notre vie n'a alors plus eu de contrainte, nous vivons à la manière des hippies d'autre fois, fumant au coin du feu, vivant d'amour et d'eau fraîche. Enfin, bien que notre lien soit des plus fusionnels, il n'y a jamais rien eu entre elle et moi. Pour tout dire, je ne sais pas du tout ce que je ressens vis-à-vis d'elle. Je tiens à elle, c'est tout ce que je sais. On a commencé un pseudo-business pour survivre : de l'artisanat. On construit des objets en rapport avec nos goûts, notre culture, et on les revend. Parfois ce sont des dessins, des peintures, parfois des bijoux, des objets tels que les attrapes-rêves. Parfois même des meubles de récupération. Pour tout dire, je suis heureux. Pour la deuxième fois de ma vie, je suis heureux. J'ai repris goût à la vie.
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Tu me rejoindras, d'accord ? Son regard triste et amer me fend le cœur. Je sais qu'elle m'en veut de partir, de la laisser. Ma main glisse tendrement sur sa jour et j'ancre mon regard dans le sien.
C'est que pour un temps, ok ? Elle a un rictus.
J'aurais dû m'en douter. Devant mon regard d'incompréhension, elle ajoute :
Que tu partirais. T'es bien parti de chez toi sans éprouver le moindre remord, alors j'aurais dû me douter que tu me laisserais, moi aussi. Que tu partirais. Ses mots me blessent, probablement parce que j'y perçois une once de vérité. Elle n'a pas tord, et j'en ai honte.
Si ce n'est que toi je t'ai prévenue. Elle secoue la tête et je sens qu'elle retient ses larmes. Je dois avouer que moi aussi, j'ai du mal à contenir les miennes.
J'ai pas envie de te perdre, Oona. Elle tourne enfin son regard vers moi. Elle me toise et je sens qu'elle tente de décider si elle doit me croire ou non. Au final, je crois que ses sentiments prennent le dessus.
Tu vas me manquer Nah'. Un sourire triste s'empare de mes lèvres.
Toi aussi. Puis je la serre fort dans mes bras. J'ai pas envie de la quitter. Mais je dois retourner à White Oak. Réparer mes erreurs. C'est là-bas ma ville. C'est là qu'est ma famille. Et une fois que j'aurais réglé tout ça, alors elle pourra venir. Alors elle pourra faire définitivement partie de ma vie. Pas avant.