~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Le premier mot dont elle se souvient en repensant à ses années de lycée c'est: ringard. Des lunettes rectangulaires qui recouvraient son visage acnéique d’adolescente, des tresses horribles, toujours désordonnés dans les cheveux. Elle se souvient de ses vêtements, pas sexy, des pulls, des jeans larges, jamais de maquillage. En clair, elle était ce qu'on pouvait appeler: une looseuse. Personne ne faisait jamais attention à elle, la petite brune, sans formes, intelligente pourtant mais sans charme. Elle n'avait pas beaucoup d'amis, peu de connaissances masculines également. C'est quand elle tomba amoureuse d'un garçon de sa classe que tout changea, elle qui ne faisait pas attention aux avis des autres, aux moqueries, aux regards intimidants sur son physique qu'elle se rendit compte qu'il fallait qu'elle se transforme. La chenille devint un papillon. Elle était juste trop naïve pour se rendre compte que les gens n'étaient pas tous sincères et sur quoi qu'on fasse si on reste une victime, c'est fini pour toi. Elle avait subit avant de se décider à remonter la pente, elle avait subit et des séquelles resteront toujours plantées dans sa mémoire. L'adolescence ? Le lycée ? Ce n'était qu'un passé qu'elle souhaitait oublier, pour toujours. Après le lycée, on ne pouvait même plus la reconnaître. C'était devenue une femme, le mot looser n'existe plus chez elle. Maintenant le seul mot qu'elle emploie quand elle se voit c'est: magnfique.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
Magnifiée, peut être mais au fond elle le sait bien. Candice était devenue une petite peste à sa manière, elle croque la vie à pleine dent et ne s'en cache jamais. Provenant d'une bonne famille elle n'avait pas besoin de se préoccuper de l'argent, elle avait assez bien réussit dans la vie grâce aux relations de ses parents et à sa motivation certaine afin de percer dans le monde de la mode. Elle vit désormais dans un appartement spacieux, luxurieux, lumineux qui la représentait assez bien. Heureuse elle l'était, dommage qu'elle ne soit qu'une manipulatrice, tentatrice et dangereuse personne. Elle n'a pas vraiment d'amies ou très peu, elle enchaîne les coups d'un soir et ne s'est jamais préoccupé de sortir avec quelqu'un. Elle n'a plus confiance et derrière ce visage angélique se cache encore la peur que des regards rabaissant ne se retournent un jour contre elle.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Candice envisage de d'ouvrir sa propre collection de vêtement, d'envahir le monde de la mode et d'y appliqué sa marque. Secrètement, elle aimerait également se voir mariée et avoir des enfants mais cela elle ne l'avouera jamais devant ses proches ou ses amis. Elle ne montrera jamais ses points faibles ni ses rêves cachés, il y en a tellement. Pour elle c'était ringard, trop niais. Elle n'était plus cette fille là, elle voyait plus grand, plus loin. C'était peut être trop ambitieux mais rien n'échappe à l'obstination de Candice.

Pourquoi devrais-je revenir sur ce passé que je m'obstine à oublier? Vous savez, la vie n'est pas noire ou blanche pour chacun. Y'en a qui ont cette chance de vivre une vie paisible, sans problèmes. Y'en a qui ont une vie de merde, y'en a qui essayent de passer à autre chose. Ce n'est pas que j'ai détesté ma vie à ce point jusqu'ici mais je me dit quand même que comparé à ce que je suis devenue, à tout les efforts que j'ai donné. Je suis quelqu'un d'autre, j'ai changé, parce que c'était juste humiliant d'avoir été celle que j'étais. Pourquoi je ne m'aimais pas? Pourquoi changer? Ne pas rester soi même n'est-ce pas une erreur? Et quand tu souffres parce que t'as été trop crédule, t'as été trop discrète, un fantôme en sorte. Quand t'as été trop naïve pour croire que les gens étaient sincère, tu te retrouve un jour les mains sur le visage à crier au monde: putain pourquoi je devrais rester comme ça?! Les gens qui ricanent, qui t'insultent ou qui envisage de te voir pleurer pour leur plaisirs. Tu peux plus, tu craques, et tu sombres parce que y'en a qui voulaient ça. Les gens ne sont pas tous cleans vous savez, peut être qu'ils souffrent eux aussi alors ils voudraient voir d'autres personnes souffrir. Ils choisissent certainement des proies faciles, ils les dévorent et passent au second repas. Enfin, vous connaissez la vie je n'ai pas à vous l'expliquez. Si vous savez observer, je suis sûre que vous auriez pu voir que dans cette vie ni noire ni blanche il y avait toujours des clans sociaux qui se formaient. Rien à foutre de connaître les sentiments, c'est des conneries tout ça. Tu vies ou tu crèves. Quand t'es un ado, surtout à cette période de ta vie, soit ça passe soit ça casse. Et moi? Vous ne savez pas? J'ai été une proie et je suis devenu un prédateur...

Par quoi commencer? Des jours heureux? Des jours sombres? On s'en fou en fait, de savoir qui j'étais vraiment. C'est banal, ordinaire. Mais j'le dis quand même, parce que faut bien qu'on se rappelle de qui j'étais et qu'on sache de ce que je suis devenu. 13h03 - Los Angeles - Naissance - Sexe féminin - Candice - 3,6 kilos. Plus précis encore? Non? Tant pis. Rien d'important jusque là je suppose que vous vous étiez douter que j'étais sortie de quelque part sinon je ne serais pas là à raconter tout ça. Je suis donc Américaine, j'ai également des origines italiennes du côté de ma mère. D'ailleurs, en parlant de mes parents, le mot qui me viendrait tout de suite en tête: influents. Ah, ils étaient pas souvent présents mes parents, ils ont divorcés quand j'avais cinq ans donc disons, que j'ai vécu la moitié de mon temps chez l'un comme chez l'autre. Le problème c'est qu'ils travaillaient dans la même boîte et qu'ils étaient obligés de rester en contact. Je sais, c'était pas facile de savoir qu'ils s'envoyaient tout les deux en l'air au bureau avec des collègues différents. Ils le savaient tout les deux, ils ont toujours eu des fantasmes étranges. Je veux pas revenir là dessus, c'est tout ce que je sais. Mes parents n'ont seulement été qu'un détail dans ma vie, et croyez moi, des détails, j'en ai eu pleins. Maintenant, disons qu'ils s'occupent juste de moi quand ils en ont besoin, ils font croire qu'ils sont inquiets pour leur fille unique adorée, ils me filent juste du fric, le reste... peu importe. C'était avant qu'ils auraient dû être là, près de moi, à me soutenir. Ils étaient trop occupés à mener leur double vies tout les deux. Irresponsables. Passons, ce n'est qu'un détail sans importance comme je l'ai dit.

Adolescence - futile - mortelle - détestable - cruelle - vengeance. J'ai cette habitude de mettre des mots sur ce que je ressens, vous l'aviez peut être compris, tout ce qui me passe par la tête j'y met des mots, j'ai eu quelques séances chez le psy, je suppose que c'est resté depuis le temps. Alors, que vous dire? Je n'aime pas en parler, pas du tout. Cela m'écoeur plus qu'autre chose, c'était un foutoir, un bordel cette période. J'avais rien demandé, j'étais qu'une gamine insouciante qui ramenait des bonnes notes à papa, maman. J'étais pas non plus une fille à problèmes, vraiment. Je ne traînais pas avec les racailles du coin, je n'avais pas réellement de "groupe" à proprement parler. J'étais juste Candice, la fille que personne ne voyais. Cela ne me dérangeait pas d'être exclue, j'avais pas beaucoup d'amis, je traînais souvent à la bibliothèque, j'étais juste heureuse de réussir mes études. Je voulais devenir avocate, je voulais défendre les gens, aider les autres. J'étais une bonne fille. Mais j'étais pas très jolie. Pourquoi les gens doivent toujours se fier au physique, t'es étiqueté parce que tu portes des lunettes, tu te maquille comme ci ou comme ça, tu portes des mini jupes. On s'en fout. Tu connais pas la personne, tu te tais. Les gens qui racontent des conneries sur des personnes qu'ils n'ont jamais connus, ça m'saoule putain. Je dit ça... oui, et j'ai changé pourtant. Je ne suis plus cette lycéenne discrète à lunette qui n'était jamais sortie avec un garçon, pas très belle, un peu ronde sur les bords, jamais maquillée comme les certaines poufs de mon lycée. Méchantes, des pestes. Comme moi aujourd'hui. Ca fait mal à dire, mais j'men fou de ce qui peut arriver aux autres maintenant. Personne ne m'a jamais aidé, alors je n'aiderai plus personne. Pour en revenir à mon histoire, j'étais contente parfois quand ces garces venaient me voir avec leur sourires de cruches. Jolies mais connes. C'est ce qui leur correspondait au mieux. Elles étaient dans ma classe, un groupe de cinq ou six vipères qui voulaient que je fasse leur devoirs, j'étais exploitée, carrément. J'me laissai faire comme une cruche, je pensais qu'elles m'acceptaient en faisant ça, qu'elles ne diraient rien de mal, qu'elles me ficheraient la paix. Ca n'est jamais arrivé. J'ai commencé à leur rendre des services, à les couvrir quand elles séchaient les cours, j'allais leur acheter parfois des pâtisseries à côté du lycée juste pour me faire bien voir. J'étais sotte, trop gentille et je ne pensais qu'à me faire aimer des autres. Je parlais presque jamais aussi, c'était difficile d'entamer la conversation avec les personnes de ma classe, je n'ai jamais su pourquoi on n'avait jamais voulu me parler depuis que j'étais arrivé en première année au lycée. Je l'ai su après. Bien après.

Je suis tombée amoureuse d'un garçon plutôt mignon, je ne me rappelle même plus de son nom, il était grand, avec de beaux yeux, des cheveux bruns, un adorable sourire. Il n'était pas prétentieux, il était gentil et très aimé au lycée. Tout le monde le connaissait et je l'admirai pour ça. Je me souviens quand je l'observai après les cours, lorsqu'il replaçait ses mèches de cheveux en arrière et souriait tendrement aux filles qui venaient l'aborder. Mon premier amour, je crois. Je me faisait des films, je sais, jamais il n'aurait voulu sortir avec la lycéenne invisible que j'étais, il ne m'avait sans doute jamais remarqué. Pourtant... il m'avait parlé, une fois. Une seule fois. J'avais fait tombé mon stylo en cours, il me l'avait rendu en gardant ce même sourire adorable. Il me rendait folle, si folle que je ne pouvais plus garder ce sentiment pour moi. C'était nouveau, c'était quelque chose de fantastique, sentir que ton coeur bat si fort pour une personne, c'était quelque chose d'indescriptible. J'étais conne. C'est tout. Puissance mille. Ils sont tous pareils, tous, avec leur masques écœurants qui laisseraient des traces de pourriture sur leur traits si bien faits. Leur coeur est noir, sombre et sale. Le mien était encore blanc, il n'avait jamais été souillé, je le sais. Je le reconnais. Mais à cet époque, je m'admirai pour ma beauté intérieure. Ce monde est pourri, on le sait, y'a toujours des personnes qui seront là pour te faire chier, jusqu'au bout.

En fait, non, carrément je vais vous le dire ce qui s'est passé. Ce mec dont j'étais folle amoureuse m'a fait croire que je pourrai être sa petite amie. C'était un jour de pluie, il m'avait attendue après les cours, il m'avait sourit et on s'était parlé jusqu'à la sortie du lycée. Il avait l'air sincère, mais mes yeux étaient sans doute trop aveugles pour voir que derrière ce visage d'ange se cachait un sale petit merdeux. Je me souviens mot pour mot ce qu'il m'avait dit, je n'avais pas rêvé, j'étais trop heureuse pour m'en rendre compte. « Tu sais, tu me plais vraiment. Ca te dirait qu'on sorte ensemble? » En y repensant, il n'avait jamais évoqué mon prénom, je suis certaine qu'il ne le connaissait même pas. Quand il m'avait annoncé ça, j'étais paralysée, mon coeur me faisait mal tant je ne croyais pas à ce qu'il venait de m'arriver. Je pensais que le monde était un conte de fée, que tout irait bien maintenant. Je me souviens de la pluie qui tombait sur mes lunettes rectangulaires, et sans doute que mon visage fut drôle à voir. Bien sûr. Après cela, il s'était avancé vers moi, je pensais qu'il allait m'embrasser mais... il avait juste tourner la tête avant l'acte final. Il avait rit et puis, je me suis brisée.  « Putain t'aurais du voir ta tête, c'était vraiment trop drôle. Tu pensais sérieusement que j'allais t'embrasser? Que j'allais même sortir avec toi? Tu m'fais rire tu sais, t'es dégueulasse, personne ne voudra jamais de toi. Tu t'es déjà regardé dans une glace. Dé-geu-lasse. » Sur ce moment, je ne m'étais pas rendue compte que j'avais certainement dû rester sans voix, et je n'avais pas remarqué non plus que le groupe de vipères qui m'exploitaient d'habitude tenaient une caméra à la main et avaient filmé toute la scène avec ma tête horrible, décomposée, en larmes. J'étais trempée, par la pluie et par mes larmes. J'ai souhaité disparaître, j'avais compris. Un pari, un vulgaire pari. L'humiliation, de la persécution. Je n'avais pas cherché à comprendre, pendant que ces filles riaient aux éclats en se moquant de moi, en m'insultant, j'avais perdu tout espoir d'être un jour considéré comme quelqu'un de normal. Je me demandais pourquoi il fallait que cela m'arrive, pourquoi? Je n'avais jamais rien demandé à personne. J'étais rentrer chez moi en pleurs, mes parents n'y avaient pas fait attention. J'entendais les mêmes horreurs en boucle dans ma tête, toujours, toujours. Ca ne s'arrêtait jamais. Je pensais que j'allais oublier, que tout allait revenir à la normale. Mais ça à continué. J'étais seule, une proie facile. La vidéo avait tourné au lycée. Je n'étais plus la fille invisible, je n'avais jamais été aussi remarquée. Mais j'étais celle à humiliée. On me riait au nez, on collait des bouts de papiers insultants sur mon casier, on me jetait des objets en classe. Je me suis renfermée, je n'ai pas changé de lycée. J'ai vécu, j'ai tenu jusqu'à obtenir mon diplôme. Je n'avais personne pour m'aider, même pas de la famille. Personne. Je pensais que ma vie n'avait aucun sens, qu'à travers ces moqueries se cachaient une part de vérité. J'ai voulu changer pour ne plus jamais à devoir subir ces moqueries sur mon physique.

Aujourd'hui, j'en suis arrivée là. Par quels remèdes? Des régimes, des séances de sports intensives, des produits de toutes sortes, je n'avais jamais utilisé la chirurgie esthétique cependant. Si je suis devenue aussi forte, c'est grâce à ce que j'ai pu endurer. Je n'accepte plus qu'on me regarde de haut, je suis devenue celle que j'aurais détesté être autrefois, ou peut être celle que j'admirai, que je voulais devenir. Je n'ai plus subit de reproches, de moqueries. J'étais devenue belle, je me suis retournée contre la vie. J'ai dit stop! L'intimidation, tout ça, ce passé, je l'ai oublié. Ma famille qui m'avait tourné le dos, qui ne s'était jamais réellement préoccupée de mes histoires, je l'ai rayée de ma vie. Je suis restée solitaire mais je me suis endurcie. Ceux qui oseront me chercher encore, je vous le garanti, cette fois... personne ne s'en sortira indemne.