~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
Ma vie au lycée ? Disons que si on la comparait à ma vie actuelle, sur une échelle de un à dix je la noterais onze, même si, à l'époque, je ne pensais pas tout à fait la même chose. Oh, bien sûr, j'étais très appréciée dans ma classe, mais la plupart du temps c'était pour deux choses ; la richesse de ma famille (qui n'est pas des moindres, nous pourrions vivre dix vies sans manquer de rien et avoir encore de l'argent après ça), et ma beauté, dont je ne me rendais même pas compte. A cet âge, on a tous tendance à se trouver laid. Même si les raisons de ma "popularité" étaient très souvent celles que je viens de citer, j'avais toutefois de très bon amis. Simples, sincères et sans faux-semblant, c'étaient vraiment des gens bien. Ils le sont toujours, même si j'ai perdu de vue Mandy, qui a décidé d'aller vivre aux U.S.
J'appris aussi à jouer du piano, et plus tard du violon, et il s'avéra très rapidement que la musique était ma vocation ; je le ressentais au plus profond de mon être, je l’interprétais, je la jouais, je ne vivais, certains jours, que pour la musique.
En cours, je me comportais de différentes façons. Parfois j'étais immobile, perdue dans mes pensées, et alors on se demandait comment je faisais pour avoir d'aussi bons résultats. On s'étonnait aussi que je susse aussi bien parler le français, presque sans accent, mais cela n'est pas étonnant, puisque ma mère est française ; j'ai appris l'anglais britannique, toutefois. D'autres fois, je n'avais rien d'autre à faire que d'écouter attentivement le cours, de répondre aux questions du professeur... Et d'autres fois encore, je déchirais un morceau de feuille et j'écrivais alors tout et n'importe quoi ; Tu crois que Josh m'aime bien ??, Non, pas de fête ce soir, mes parents ont annulé leur voyage, M. Young est vraiment trop canon !...
Quant à la relation avec mes parents, eh bien, elle n'était pas de tout repos. Un jour j'arrivais à être très gentille, je plaisantais, riais avec mes parents, d'autres fois c'est à peine si je leur adressais la parole. Je n'étais rancunière qu'avec eux et eux seulement, je détestais leur obéir alors je faisais toujours en sorte de faire ce qu'ils me disaient, avec d'autres choses en plus, non programmées et qui avaient le don de faire rager ma mère. Mon père était plus calme, lui, mais quand il s'énervait, même si c'était rare, on ne l'oubliait jamais. Je voyais une psychologue, car mes problèmes étaient plus grands qu'ils n'en avaient l'air ; en cours, j'étais l'objet de l'attention uniquement pour mon apparence et mon argent, à la maison je ne me sentais pas écoutée, parfois même j'avais l'impression d'être oubliée, et enfin, de passer après ma sœur, qui en réalité avait été adoptée. Je lui faisais la vie dure, parce que je voulais à tout prix trouver un moyen d'attirer l'attention de mes parents.
Je croyais que leur divorce soudain, à mes dix-sept, bientôt dix-huit ans, était de ma faute, mais maintenant je sais que ce n'était pas du tout cela. C'est là que tout ce que je ressentais, en me mentant à moi-même, est ressorti : tout ce manque d'affection, d'assurance, cette tristesse continuelle, tant que je ne m'en rendais même pas compte ; j'ai commencé à me scarifier, et finalement j'ai pris l'initiative d'aller voir un psychologue. Je ne voulais pas qu'on le sache, surtout pas mes parents, alors seule ma sœur est au courant, et elle ne l'est que par accident.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
Je ne sais pas si je suis heureuse. Non, en fait je le sais parfaitement. Je ne suis pas heureuse, et ce depuis quelques années déjà. De nombreuses années, en fait. Je ne m'en étais pas rendu compte, mais cela fait tellement longtemps que je ne suis plus heureuse (ou peut-être ne l'ai-je jamais été ?) que je ne sais plus comment c'est de l'être. Alors, forcément, je n'en ai pas envie. La plupart du temps, je me sens presque vide, et quand je pleure, je me rends compte que ce que je ressens à chaque instant ne fait que s'amplifier. Le vrai problème, c'est que je dois être heureuse. Non pas parce que j'en ai envie, non cela je ne peux pas, ma tristesse, ma souffrance est devenue une compagne de tous les jours, c'est la seule chose que j'aie. Non, si je dois être heureuse, c'est parce que sinon je risque de me détruire à petit feu. L'envie de me faire du mal physiquement est parfois si présente que je cède presque à la tentation. Il m'arrive d'y céder, dans les pires moments. Je crois que c'est pour ça que j'apprécie les petites choses de la vie ; je les prends comme elles sont, je ne m'en plains pas.
Je ne parle plus du tout à mon père, en fait je ne le vois même plus. Après ce qu'il a fait à notre famille, je suis incapable de lui pardonner. Voilà longtemps qu'il a cessé d'essayer de me contacter.
A présent que ma mère est malade, je dois prendre soin d'elle. Elle m'a fait jurer, alors qu'elle était encore lucide, de rester à la maison avec elle, de l'aider alors que peu à peu ses souvenirs, ses émotions s'efface, et à mesure que le temps passe, elle oublie même ses filles. C'est insupportable de la voir ainsi, si différente d'autrefois, mais il me faut être forte ; c'est ma mère, si je n'arrive pas à la soutenir, alors personne ne le pourra. Elle n'a plus que moi, à présent que ma sœur m'a dit qu'elle lui rendrait visite seulement une fois par mois. C'est trop dur pour elle, à ce qu'elle prétend, mais au vu de tout ce que je fais, j'ai beaucoup de mal à ne pas lui en vouloir. Alors, quand nous nous voyons, ce qui arrive fréquemment, nous n'en parlons tout simplement pas. Les liens sont très forts entre nous depuis qu'elle m'a aidé à surmonter mon masochisme, elle m'y aide toujours d'ailleurs. Ensemble, nous adorons faire les magasins, la tournée des bars et des boîtes, draguer des hommes alors qu'à la fin de la soirée il n'y a plus que nous deux, organiser des fêtes, faire une déco extravagante et bien à nous lors de celles-ci... C'est ma bouffée d'air frais, elle me permet d'oublier que ma mère est condamnée, et que j'aurais préféré ne pas le savoir. Elle me permet aussi oublier l'amour de ma vie, qui finalement m'aimait moins que son travail et son avenir. Il m'a dit qu'il reviendrait, et même si c'est le cas, quand il sera là, il se rendra vite compte qu'il aurait mieux fait de rester là où il est.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
Je n'ai aucune réponse à cette question. L'avenir me semble impropable, la seule certitude que je suis sûre d'avoir, c'est que ma mère va mourir, et que j'en serais totalement détruite. Ne pas pouvoir la voir alors qu'on en meurt d'envie, savoir qu'elle aura passé ses derniers instants à oublier tout ce qui la rendait heureuse, perdue dans le passé, c'est une chose si horrible que je m'efforce de ne pas y penser.
J'aimerais avoir des enfants, peut-être pas dans l'immédiat, mais dans l'avenir, oui. Je suis une grande romantique, j'aimerais aussi rencontrer l'âme-sœur, seulement chaque fois que je pense à ce désir, l'objet de mes fantasmes a toujours le même visage : celui de l'homme que j'ai perdu, qui m'a brisé le cœur. Il y a des fois où il me manque tellement que j'en veux à ma mère, à cause de qui j'ai dû rester pour pouvoir m'en occuper. Je sais que c'est totalement injuste, mais j'imagine alors quelle aurait été ma vie sans la maladie : j'aurais pu partir avec l'amour de ma vie, me marier avec lui, avoir des enfants... Mais ça, c'est impossible, et ce n'est pas de la faute de ma mère : c'est à cause de lui, et uniquement lui.
Je suis née et j'ai grandi à White Oak Station, ainsi j'ai du mal à m'imaginer vivre ailleurs. Je n'ai pas de maisons pour moi seule, j'ai toujours vécu dans la maison familiale qui maintenant me semble hantée par la maladie de ma mère. Mais même après tout cela, je reste optimiste et l'espoir d'une vie meilleure ne m'a quittée. Avec ma famille, on ne trouve pas de sens plus juste au célèbre diction : "L'argent ne fait pas le bonheur".

PRÉNOM ET/OU PSEUDO: tori. PAYS: France. PRÉSENCE: Normalement 7j sur 7. COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM? En le cerchant   euh non en fait, je crois que je m'en souviens même pas...     PERSONNAGE INVENTÉ OU SCÉNARIO? Inventé. AUTRE CHOSE À AJOUTER? Euh... Bouh ?   

De nombreuses vies débutent avec une histoire d'amour. Celle-ci semble indestructible, intouchable par le temps, rendue forte par le meilleur et résistante au pire. Ce ne sont que des fables.
Mes parents, aussi loin que je me souvienne, ont toujours été séparés. Oh, bien sûr, il y eut des moments où ils voulurent recoller les morceaux, comme tout couple dont l'amour fut passionné et inconditionnel. Toutefois ça ne durait jamais longtemps. J'ignore pourquoi mes parents se sont séparés, ils ne m'en ont jamais parlé. En revanche, je sais tout de leur rencontre à Paris dans un petit bistrot, le hasard réunissant deux âmes seules. Tout les réunissait : riches héritiers de grande famille, ils avaient décidé de s'évader hors du cocon familial et de découvrir le monde par eux-mêmes. La seule différence, c'était que ma mère est française, et mon père anglais. Oh, cela ne gênait en rien, bien au contraire. Cela leur fournissait à tous deux une note d'exotisme qui, je pense, fut la première à les attirer l'un vers l'autre.
Un an après leur rencontre seulement, ils se marièrent. Ils voulurent avoir des enfants pendant de longues années, malheureusement ma mère était stérile, tout du moins c'est ce qu'on pensait. Ils adoptèrent ma sœur avant que, coup du destin, à peine deux ans après, ma mère tomba miraculeusement enceinte de moi.
C'est pour cette raison que j'ignore ce qui les a séparés peu de temps après ma naissance, trop loin pour que je gardasse le moindre souvenir du couple qu'ils furent. Ils restèrent avec nous pour nous, je pense.
Mon enfance, malgré la séparation de mes parents (rendue évidente de par mon nom, celui de jeune fille de ma mère), fut heureuse, enfin je crois. Je n'avais pas spécialement de problème, en tout cas, contrairement à ma sœur, ce n'était rien. La casse-cou de la sororité, la petite rebelle qui apparemment parvint très vite à déteindre sur moi, toutefois pas totalement. J'étais plus modérée que ma sœur, moins impulsive et bien plus prudente.
Cela ne changea pas au fil des années, au contraire, la déception de mes parents face à la certitude que jamais nous ne changerions fut grande, mais je suppose qu'ils firent avec.
Je m'éloignai de ma sœur quand j'en eus assez d'être dans son ombre ; je la suivais, faisais ce qu'elle faisait, mais jamais aussi bien et autant qu'elle. Je décidai de me démarquer, et peu à peu les liens que nous unissaient se distendirent. Au lycée, j'étais totalement indépendante d'elle et je ne laissais plus son influence me toucher. Je crois que j'avais notre relation en horreur car il m'était insupportable de passer après elle, et je ne me trompe pas en affirmant cela. Ce n'était pas qu'une impression ; j'étais vraiment celle qui passait en dernier, et cela ne s'arrangea pas ensuite, quand mon père décida de quitter la maison ; il avait trouvé quelqu'un, et ce quelqu'un n'était pas ma mère. Je lui vouai une rancune farouche et depuis ne lui adressai plus la parole ni le revis, d'ailleurs.
Je me souviens du jour de l'anniversaire de ma sœur. Pour ses dix-huit ans, elle eut une voiture. Quant à moi, trois ans plus tard, il n'en fut rien ; ma mère m'accorda une virée shopping et je n'osai pas lui demander pourquoi moi, qui étais pourtant de son sang, et qui n'avais jamais rien fait pour lui déplaire, je veux dire vraiment, n'avais pas eu le droit à une voiture. Cela peut sembler absurde, mais j'ai en tête des centaines d'autres exemples. Ma sœur, les larmes aux yeux (rare évènement à l'époque, d'ailleurs toujours aujourd'hui), qui se fait consoler et cajoler par notre mère, et moi, dans le même état un autre jour, qui reste seule dans mon coin sous les regards indifférents des autres. Indifférents ? Non. Je sais que cela ne leur était pas égal ; j'étais leur fille et sœur, il était impossible qu'ils ne m'aimassent pas. Seulement, il y avait là une forme de retenue qui m'était insupportable et qui attisait ma colère et ma tristesse, compagnes de tous les jours à présent.
C'est là que je commençai à me scarifier, prétendant toujours que tout allait bien. Dans les moments où j'étais au plus bas, la douleur m'aidait. J'étais dépendante d'elle tandis qu'elle me permettait de me calmer, de presque me sentir bien, seulement ce bien n'en était pas un ; il était malsain. Ce besoin devint une pulsion, jusqu'au jour où ma sœur, qui me trouva là, un canif à la main, le bras en sang, mit un frein à mes pulsions. Je me rendis compte de la gravité de mes actes, que cela pouvait me détruire en allant trop loin ; il fallait que ça cesse.
C'est à ce moment que les liens entre ma sœur et moi se tissèrent à nouveau, plus forts que jamais. Pendant longtemps elle fut mon roc, m'empêchant de sombrer à nouveau.
Mais je n'étais toujours pas satisfaite. Il me manquait quelque chose pour parfaire ces prémices du bonheur, à portée de main, pourtant insaisissable. Je m'accrochais à ma douleur, et il me faudrait plus que l'attention d'une sœur pour m'en séparer.
Durant mes études, je fis la rencontre de Jonathan, qui à présent est un ami presque aussi proche que ma sœur. Deux ans après notre rencontre, il m'avoua avoir des sentiments pour moi ; il était clair qu'il voulait plus que de l'amitié entre nous. Je coupai les ponts durant les vacances d'été, que je passai à réfléchir au calme dans la maison de vacances familiale en France, dans une campagne montagneuse très tranquille, mais finalement Jonathan m'annonça à la rentrée qu'il était désolé, que ce n'était qu'un béguin et que ça passerait ; notre amitié était trop précieuse pour risquer de la perdre, et ni lui ni moi ne voulions prendre le risque qu'une telle chose arrive.
C'est peu après que je le rencontrai. Reyes. Un apollon au sourire charmeur et aux yeux taquins dans une attitude parfaite de bad boy. Un jeu s'installa entre nous, un jeu de séduction dans lequel je tentai de lui résister. Mais l'alchimie fut la plus forte, et je vécus avec lui les deux plus belles années de ma vie. Une passion tumultueuse, un amour inconditionnel, qui me fit oublier le fait que Jonathan était très bizarre avec moi. J'étais comme on dit sur un petit nuage ; bientôt l'orage éclata et le nuage disparut.
Car Reyes avait pour projet de s'élever et de bad boy devenir un play boy milliardaire. Déjà riche avant cela, il gravit les échelons de son entreprise, jusqu'à connaître la plus grande opportunité de sa vie : PDG d'une multinationale, dont le bureau était à New York.
J'aurais voulu le suivre ; il me supplia presque. Mais à cause de la maladie de ma mère, et de la promesse que je lui avais faite, et je dus me résoudre à rester. Je pensai que Reyes ne partirait pas, qu'il voudrait toujours être à mes côtés. Je me trompai. Il m'annonça qu'il partait seul, mais que ce ne serait pas pour longtemps ; une fois ses positions consolidées, il pourrait gérer l'entreprise depuis White Oak Station. Je crois qu'il ignore que j'ai fait une croix sur lui. Cela a failli me détruire.
Comment aurais-je pu le croire, ou seulement avoir envie de l'attendre ? Oh, oui, parfois, j'en ai terriblement envie, mais alors je me souviens qu'il a aimé son travail et sa puissance plus que moi, et je me jure de ne plus jamais lui faire confiance. Je ne trouve même pas les mots pour décrire ce que je ressens. La colère, la frustration, la tristesse et la rancune, voilà tout ce qu'il m'inspire à présent. Enfin, dans des moments de faiblesse ou dans mes rêves, c'est plutôt le désir et la nostalgie. Je n'arrive pas à l'oublier ; je n'en ai pas envie. Masochisme ou amour ? Je ne saurais le dire. Cela fait un peu plus d'un an et je me dois de passer à autre chose.
Dès lors je me concentrai sur la maladie de ma mère, qui a désormais envahi ma vie. Mes seules bouffées d'air frais sont ma sœur et Jonathan. Avec eux, nous nous comprenons parfaitement, si bien que des paroles sont inutiles. Sans ces deux précieuses personnes, je ne serais qu'une épave. Heureusement grâce à eux j'ai encore un semblant de vie auquel je m'accroche et que je défends férocement. La musique devient une nécessité ; je joue du piano et du violon dès que je le peux, mais je joue pour moi seule, enfin pour maman aussi, quand son humeur s'y prête. Je suis capable de m'évader pendant des heures au son des touches sous mes doigts et des cordes sous l'archet. Je compose, mais là encore, uniquement pour moi. Pourquoi ? Je ne sais pas. Peut-être parce que c'est l'une des très rares choses qu'il me reste encore, sur lesquelles j'ai un total contrôle. Une chose qui m'appartient totalement.