~ À QUOI RESSEMBLAIT TA VIE AU LYCÉE?
fille unique d'une famille très en vue de white oak station, beaucoup croyaient qu'ainsley était populaire auprès de ses camarades, voire la reine du lycée. faux. élève brillante, beaucoup trop d'ailleurs. si les professeurs ne tarissaient pas d'éloges à son égard, le revers de la médaille se trouvait dans les moqueries de ses camarades. elle était trop différente d'eux, tout d'abord elle était la première de la classe partout, par conséquent elle devenait la petite chouchoute des professeurs, ensuite, comme tout enfant précoce, elle vivait un peu dans son monde, elle était un peu déconnectée de ses petits camarades, et enfin elle avait des tocs, des troubles obsessionnels du comportement. ça peut paraître lourd comme cela mais en vérité les enfants précoces sont souvent par la même occasion sujets à des troubles comportementaux, c'est une particularité à deux visages, un janus. elle n'avait pas vraiment d'amis mais ce n'était pas ça le problème, elle s'y était habitué et n'en cherchait pas vraiment non plus, par contre elle a pas mal morflé en moqueries et en humiliations publiques.

   ~ ES-TU HEUREUX PRÉSENTEMENT?
on peut dire qu'elle l'est oui. elle a apprit à faire fi des remarques des autres et à ne pas s'occuper du jugement d'autrui. elle est beaucoup plus indépendante du regard des autres désormais. elle n'a pas plus d'amis mais cette situation lui convient très bien. elle a trouvé sa voie, grâce à son intelligence elle a pu faire de sa passion son métier et en est vraiment dingue. son boulot c'est toute sa vie et ce n'est pas rien. Se lever motivée par ce que l'on va faire toute la journée n'est pas donné à tout le monde, surtout quand on sait que c'est ce que l'on va faire pendant plusieurs années. et puis aussi, il faut le dire, elle est amoureuse. même si c'est pas super simple en ce moment, ils se sont bien amusé. c'est bien la première fois qu'elle s'attache autant à quelqu'un mise à part ses parents. alors dans le pire des cas, si ça ne s'arrange pas, on peut dire que ça valait la peine quand même.

   ~ OÙ TE VOIS-TU DANS DIX ANS?
elle ne sait pas si elle aura quitté cette ville ou non. en fin de compte elle ne sait pas grand chose. se projeter dans l'avenir, c'est quelque-chose qu'elle n'a jamais aimé réellement faire. on fait des plans sur la comète et puis finalement rien ne tient, il y a toujours quelque-chose ou quelqu'un qui vient tout remettre en question. un accident et si vite arrivé, à quoi bon se projeter dans dix ans, c'est beaucoup trop loin. au mieux, elle peut se projeter dans deux ou trois ans. quoique si on pourrait dire que, comme tout le monde, elle se voit dans dix ans capable de s'offrir tout ce dont elle a envie dans la limite du raisonnable, une garde-robe classe et bien remplie, une belle petite maison savamment décorée... bref elle se voit avec de belles choses autour d'elle, espérant qu'elle aura l'argent pour se les offrir. et sur le plan professionnel aussi, surtout, elle se voit reconnue par ses pairs et spécialisée dans les us et abus de la presse et des médias, les questions éthiques et juridiques que posent l'explosion de la communication, avec la question de la révolution numérique et des libertés des internautes. ça elle aimerait bien c'est sûr, mais bon dans la vie on n'a pas ce qu'on veut.

“So she wanna pick up the torch ?” Ses parents avaient invité des amis à diner. “If only Terry, if only…” Son père. “Ma’am wanna do big studies.” Sa mère. On sentait une pointe de mépris dans sa voix. Inutile d’être devin pour se rendre compte que cette idée ne plaisait guère aux parents de la belle. “I very keen on law.” Ainsley, comme pour rattraper la situation, prouver qu’elle ne perpétuerait pas la tradition familiale simplement par esprit de contradiction. L’idée prit du temps à être acceptée dans l’esprit de ses parents. Heureusement, bien qu’opposés, ils ne l’empêchèrent jamais d’aller étudier le droit à la fac. Ils ne cessaient de faire de la petite propagande faisant clairement savoir à Ainsley à quel point ils enviaient les couples dont les enfants avaient repris l'entreprise familiale. Les choses s’arrangèrent quand ils trouvèrent en Skyler le repreneur du restaurant. Jones avait été formé chez eux, il faisait quasiment parti de la famille, alors le restaurant ne partait pas aux mains d’un parfait étranger, il saurait respecter l’esprit du lieu.

“What the fuck are you doing Hoover ?” Gabriel était encore couché, la tête littéralement encastrée entre les deux oreillers. “Uh nothing.” Ainsley n’était pas une très bonne menteuse, c’est pourquoi Peters releva sa tête et ouvrit les yeux d’un air inquisiteur, bien que la lumière du jour frappait de plein fouet ses pupilles. “Well, I was just looking the way you sleep.” Elle l’avoua en rougissant, comme si elle avait fauté, ce qui finalement n’était pas loin d’être le cas aux yeux de Peters. “I know you’re not interested in feelings but…” Elle se mit à trifouiller ses phalanges, à se les tordre, à se les croiser, à se frotter les mains dos contre paume. Et pour ne pas avoir à le regarder dans les yeux tout en donnant l’impression de le faire, elle fixa son front. “You drive me dizzy.” L’instant d’après Ainsley était sur le palier. Devant sa réaction, la jeune Hoover lui avait certifié qu’il l’appréciait beaucoup plus qu’il ne voulait l’admettre ou qu’il ne voulait se l’avouer, mais cela n’a eu pour effet que de redoubler la vitesse à laquelle Gabriel l’a mis dehors.